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2009
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Évolution des pratiques de mobilité dans la vieillesse : un suivi longitudinal auprès d’un groupe de banlieusards âgés

Changes in daily mobility uses in old age: a longitudinal follow-up of a group of elderly suburbanites
Sébastien Lord, Florent Joerin et Marius Thériault

Résumés

Une majorité de banlieusards nord-américains aspire à vieillir à domicile. Dans un milieu dédié à l’automobile, l’accès à la mobilité risque d’être une dimension-clé pour le maintien de ces aspirations. Peu de recherches peuvent toutefois témoigner de l’évolution temporelle des aspirations résidentielles des aînés, pas plus que des transformations de leur mobilité sur le territoire. C’est dans cette optique que cent deux banlieusards âgés de l’agglomération de Québec au Canada ont été consultés à deux reprises, en 1999 et 2006. Parmi ceux-ci, soixante-dix résidaient toujours à la même adresse en 2006. Étonnamment, les répondants qui ont déménagés ne sont pas ceux pour qui un déménagement semblait le plus probable en 1999. En 2006, cinquante-sept d’entre eux, maintenant âgés de 61 à 89 ans en 2006, ont répondu à un questionnaire postal (62 %). Des portraits comparatifs des pratiques de mobilité ont été produits sur la base de statistiques descriptives couplées à des analyses spatiales. Pour dix-sept sujets, leur mobilité demeure inchangée, pour seize une diminution est observée, mais une augmentation de la mobilité est à relever pour les quinze autres. Pour les neuf derniers, leur mobilité s’est transformée sans impliquer d’augmentation ou de diminution. Un accroissement de la mobilité semble s’expliquer par des facteurs socio-spatiaux, notamment la relocalisation des services de proximité en périphérie de certains secteurs de banlieues. Les dimensions individuelles affectant l’accès à l’automobile, notamment l’âge et le niveau d’autonomie, rendent compte d’une réduction.

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Texte intégral

Introduction

  • 1 La mobilité quotidienne se réfère aux déplacements quotidiens d’un individu dans un espace géograph (...)
  • 2 L’auto-mobilité se réfère à l’usage généralisé de l’automobile comme moyen de déplacement.

1La recherche récente montre le vieillissement des sociétés occidentales ; le Québec, comme le Canada, n’y font pas exceptions (Conseil des aînés, 2007). Si ce phénomène est une tendance globale, il s’observe de manière exacerbée dans les premières banlieues pavillonnaires (suburbs) construites au tournant des années 1950 en Amérique du Nord (Puentes & Warren, 2006) et en Australie (Paterson, 1997). Or, la mobilité quotidienne1 est, dans ces milieux de faible densité, quasi-synonyme dauto-mobilité2. Si les personnes vieillissantes et âgées d’aujourd’hui font de plus en plus de déplacements (Rosenbloom, 2003), tôt ou tard des problèmes sont à prévoir en raison de limitations d’autonomie et de la perte ou de l’abandon du permis de conduire (Hare, 1992). Le vieillissement à domicile comme alternative à l’institutionnalisation (MSSSQ, 2003) suggère plusieurs questionnements quant à la qualité de vie offerte dans ces suburbs. La capacité des personnes vieillissantes à se déplacer dans l’espace urbain s’avère un facteur-clé pour une expérience résidentielle positive (Daris, 2003 ; Després & Lord, 2005). L’enjeu central du vieillissement en banlieue réside ainsi dans la capacité des aînés à se mouvoir, en voiture ou non, sur un territoire marqué par l’éloignement des services, des lieux de loisirs et de socialisation.

  • 3 Plusieurs concepts font l’objet d’analyses et de débats, comme par exemple l’espace de vie (Courgea (...)

2C’est dans une perspective longitudinale et exploratoire qu’un groupe de cent deux banlieusards âgés 61 à 89 ans de l’agglomération de Québec au Canada a été consulté à deux reprises, en 1999 et en 2006. Cet article compare, d’une part, les choix résidentiels d’aînés observés en 2006 face à leurs aspirations de 1999 et, d’autre part, l’évolution de leurs pratiques de mobilité selon les deux mêmes années de référence. Le présent article effectue ainsi une mise à jour des travaux développés avec les mêmes répondants six ans plus tôt (Lord et al., à paraître). La mobilité quotidienne est ici étudiée dans ses dimensions objectives à l’échelle de l’individu. Ayant comme élément de départ le concept de déplacement (Golledge & Stimson, 1997), la mobilité quotidienne a été analysée avec le concept d’espace d’action (Dijst, 1999 ; Schönfelder & Axhausen, 2002)3 .

Aspirations résidentielles et pratiques de mobilité en question

Vieillir en banlieue le plus longtemps possible

3Les obstacles fonctionnels au vieillissement dans le cadre géographique des banlieues sont mis en exergue par les professionnels en aménagement (Lord, 2004 : 63-75). Ces difficultés ne sont cependant pas une préoccupation quotidienne pour les banlieusards vieillissants. Une large majorité des personnes âgées résidant en milieu pavillonnaire aspirent à demeurer le plus longtemps possible dans leur maison et leur quartier (Davison et al., 1993 ; Wagnild, 2001). Des recherches montrent la faible mobilité résidentielle des aînés (AARP, 1996, 2000) ainsi que leurs préférences pour ce cadre de vie (Després & Lord, 2002 ; Grove & Wilson, 1992 ; Roy, 1996). Ce constat est corroboré par des études qualitatives qui exposent la complexité et la richesse de l’expérience résidentielle du "chez-soi" dans la vieillesse (Davison et al., 1993 ; Després & Lord, 2005). Peu de recherches ont toutefois vérifié l’évolution des aspirations résidentielles chez un même groupe d’individus (ex. Krout et al., 2003).

4Si les personnes âgées planifient peu leur avenir résidentiel (Robison & Moen, 2000 ; Krout et al., 2003), la perte éventuelle de leur voiture ne l’est pas plus (Lord et al., à paraître ; Polzin & Page, 2005). Elles choisissent plutôt de contourner les problèmes fonctionnels quotidiens que posent leur vieillissement en banlieue, notamment ceux associés à la mobilité quotidienne. Une grande capacité et un fort désir d’adaptation des aînés à leur environnement résidentiel sont observés (Lord & Luxembourg, 2006 ; Ruechel & Mann, 2005). Toutefois, là encore, peu de recherches se sont intéressées à l’évolution ainsi qu’aux transformations de la mobilité quotidienne sur un territoire géographique circonscrit (Boffi et al., 2004 ; Fökber & Grotz, 2006 ; Hendrickson & Mann, 2005 ; Schönfelder et al., 2003).

La variabilité des pratiques de mobilité quotidienne chez les aînés

5La mobilité quotidienne des individus et des ménages s’observe par les pratiques de mobilité (nombre de déplacement, distance parcourue, mode de transport, etc.) dans l’espace et le temps. Dans cette optique, l’approche de la Time-Geography d’Hägerstrand peut aujourd’hui être opérationnalisée avec les possibilités qu’offrent les systèmes d’information géographique (SIG) pour l’analyse de données désagrégées (Kim & Kwan, 2003 ; Thériault et al., 2005 ; Joerin et al., 2001). Les études s’intéressant spécifiquement à la mobilité quotidienne des aînés mettent en jeu les difficultés de déplacement que rencontre l’individu en raison de son vieillissement. Ces obstacles sont par exemple liés aux limitations d’autonomie fonctionnelle et à la perte d’acuité sensorielle (Fozard, 2000). Si une tendance globale à la réduction du nombre de déplacements ainsi que des fréquences de sortie des aînés est observée, d’importantes variations au sein du groupe des plus de 65 ans doivent être considérées (Rosenbloom, 2003 ; Sampson & Staplin, 2003 ; Alsnih & Hensher, 2003). Les aînés ne forment pas un groupe socio-économiquement homogène (Conseil des aînés, 2003), cela s’exprime d’autant dans leurs pratiques spatiales. "There is […] a more pronounced connection between health and travel in older persons, and the relation between variables such as gender, housing, social activities, financials, and marital status are more complex in older population than in working-age population" (Siren & Hakamies-Blomqvist, 2004, 108).

6Hidlebrand (2003) et Rosembloom (2003) dans des travaux états-uniens, ou Schönfelder et al., (2003) et Fökber & Grotz (2006) dans des études européennes, mettent ainsi en exergue, paradoxalement, la "grande" mobilité des personnes vieillissantes. En effet, les déplacements peuvent augmenter au passage à la retraite. Certains individus âgés se déplacent autant, voire plus que les cohortes de travailleurs plus jeunes. N’ayant plus de contraintes liées au travail, c’est principalement la mobilité de consommation et de loisirs qui contribue à faire augmenter le nombre et la fréquence de leurs déplacements (Rosenbloom, 2003). Ainsi, l’âge n’est pas l’unique déterminant de la mobilité quotidienne dans la vieillesse, il doit être considéré en relation avec d’autres dimensions qui y sont étroitement liées, notamment l’autonomie fonctionnelle.

7En fait, seul un âge relativement avancé, souvent accompagné de limitations d’autonomie et de problèmes de santé, réduit de manière drastique le nombre de déplacements des individus. L’atteinte des 75-80 ans ressort comme un seuil marquant cette baisse (Benlarech, 1998 ; Fökber & Grotz, 2006 ; Mitchell, 2003 ; Pochet, 1996 ; Shunway-Cook et al., 2002 ; Stern et al., 2003). Posséder un revenu limité et une faible scolarité sont aussi des variables associées à un nombre plus restreint de déplacements dans la vieillesse (Pochet, 1996 ; Whelan et al., 2006). L’analyse comparée des aînés et des aînées montre que les femmes réalisent moins de déplacements quotidiens, parcourent des distances plus courtes, s’éloignent moins du domicile et abandonnent plus tôt l’usage de la voiture que les hommes (Pochet, 1996 ; Rosenbloom, 2003 ; Waldorf, 2003 ; Whelan et al., 2006). Si la motorisation des baby-boomers risque de faire disparaître les différences de genre (Pochet, 1996 ; Rosenbloom, 2003), la plus longue espérance de vie des femmes peut toutefois les placer dans une plus grande vulnérabilité que les hommes (Alsnih & Hensher, 2003).

Les espaces d’action des aînés

  • 4 Le concept de mode de vie se réfère aux pratiques (ou groupes de pratiques) réalisées par un indivi (...)

8Le concept d’espace d’action peut être utilisé pour représenter et analyser la mobilité quotidienne dans une perspective géographique et de planification urbaine (Dijst, 1999). L’espace d’action correspond à l’espace des activités quotidiennes, espace où se réalisent les pratiques spatiales et sociales d’un individu observables sur un territoire (ex. travailler, consommer, se divertir, rencontrer, etc.). L’espace d’action peut être empiriquement construit sur des bases effectives, avec des déplacements réels ou des lieux régulièrement visités, ou sur d’autres considérés comme potentiels avec des lieux / espaces perçus (Ramadier, 2003) ou possibles sous différentes contraintes. Fondamentalement, cette perspective permet d’aborder la mobilité quotidienne de manière plus large que le concept de déplacement – mouvement observable entre une origine et une destination – en l’articulant aux modes de vie4. Plusieurs concepts coexistent pour étudier cet espace individuellement ou collectivement (Boulabal, 2000). Si cela donne lieu à plusieurs représentations cartographiques, l’ellipse, dans un plan à deux dimensions, et le cylindre, dans une représentation incorporant la dimension temporelle, sont souvent utilisés.

9Quelques études ont abordé les pratiques de mobilité des personnes âgées dans un espace géographique circonscrit. Certaines ont géoréférencé les lieux visités sur le territoire par des aînés dans des SIG (Boffi et al., 2004). D’autres ont calculé des distances euclidiennes entre le domicile d’individus âgés et les lieux qu’ils fréquentent sur le territoire (Föbker & Grotz, 2006 ; Smith & Sylvestre, 2001), ou comparé les espaces d’action formés par la dispersion de plusieurs lieux visités dans l’espace urbain par des individus âgés à d’autres plus jeunes (Schönfelder & Axhausen, 2003). Enfin, de manière à prendre en compte la dimension temporelle, des études ont questionné des individus âgés sur les distances qu’ils parcouraient dans le passé (Hendrickson & Mann, 2005).

10Tout comme pour les études sur les déplacements des aînés, une grande variabilité caractérise les espaces d’action des aînés. Schönfelder & Axhausen (2003), dans une recherche menée en Allemagne, n’observent pas dans leur enquête de différences entre les pratiques de mobilité des aînés vis-à-vis des individus plus jeunes. A l’opposé, Föbker & Grotz (2006) observent des espaces d’action plus restreints et un nombre de sorties quotidiennes plus limité chez les répondants les plus vieux. Ces auteurs, dans leur enquête auprès d’Allemands de plus de 60 ans habitant quatre types de milieu, dont l’un pavillonnaire et comparable à la banlieue, montrent que les plus de 75 ans sortent moins souvent, indépendamment de leur autonomie. Par contre, les aînés étudiés ne fréquentent pas nécessairement les établissements les plus proches de leur domicile. Leurs déplacements de consommation, même s’ils sont moins fréquents, continuent à se déployer dans un rayon d’action relativement étendu. Le passage des 75 ans semble aussi marquer la chute du nombre de déplacements réalisés par l’aîné.

11Dans une recherche à plus petite échelle menée auprès de quarante personnes de plus de 60 ans et limitées dans leur autonomie, Hendrickson & Mann (2005) montrent une réduction de la superficie de l’espace d’action avec un vieillissement combiné à des problèmes d’autonomie. Les répondants, au moment de l’enquête, parcourraient 50 miles par semaine contre 87 miles 6 ans plus tôt et 155 miles 15 ans avant l’entretien. Au contraire des résultats de Föbker & Grotz (2006), sans toutefois les avoir géoréférencés, le nombre de lieux visités sur le territoire est cette fois demeuré stable, voire a légèrement augmenté. Au moment des entretiens, le groupe d’aînés fragilisés semblait posséder une mobilité plus éclatée sur le territoire en fréquentant, en moyenne, 5,83 lieux par semaine comparativement à 5,70 6 ans plus tôt et 5,60 15 ans auparavant.

Le biais de la voiture individuelle?

12Les recherches réalisées en banlieue, ou en milieux périurbain et rural, montrent la place centrale de l'automobile dans la mobilité quotidienne des aînés et ce jusqu’à un âge très avancé (Lord & Luxembourg, 2006 ; Siren & Hakamies-Blomqvist, 2004). Elles témoignent des effets structurants de la forme urbaine sur les pratiques de mobilité et sur le taux de motorisation des populations résidant en quartier de faible densité, y compris les aînés. Rosenbloom (2003) souligne la tendance des aînés états-uniens résidant en milieu pavillonnaire à multiplier le nombre de petits déplacements automobiles près du domicile. L’auteure montre aussi que les personnes âgées s’en remettent quasi-exclusivement à la voiture individuelle pour se déplacer. L’usage des moyens de transport en commun par les banlieusards âgés est marginal.

13Non seulement la dépendance à l’automobile se poursuit dans la vieillesse, mais des recherches comme celles de Siren & Hakamies-Blomqvist (2004) en Finlande montrent qu’elle s’accentue. Avec l’arrivée de problèmes d’autonomie et de santé, la voiture individuelle intervient comme une prothèse à la mobilité corporelle. Elle permet, que l’on soit conducteur ou passager, de poursuivre les activités quotidiennes et de participer à la vie sociale. En conséquence, la démotorisation des aînés (Epinasse, 2005) est une rupture psychologique, sociale et symbolique où l’aîné se voit confronté à la perte de son autonomie de déplacement, et donc à la possibilité d’abandon de plusieurs dimensions de son quotidien (Coughlin, 2001). À ce titre, Lord et Luxembourg (2006) observent que des aînés banlieusards québécois et aixois modifient leurs pratiques de mobilité sans cesser toutefois d’utiliser leur voiture : 1) modification des trajets empruntés au profit de plus petites voies, 2) changement des heures des sorties pour éviter des difficultés (circulation, conduite en soirée, etc.), 3) remplacement de certains lieux par d’autres mieux accessibles et 4) abandon d’habitudes impliquant trop de stress.

Des aînés aux modes de vie variés?

14L’amélioration des conditions socio-économiques des aînés, leur accès quasi-généralisé à la voiture individuelle et la mobilité croissante des sociétés occidentales permet le maintien de modes de vie de plus en plus variés dans la vieillesse. C’est ce qu’observent Alsnih & Hensher (2003), Rosenbloom (2003) et Daris (2003). Ces constats suggèrent de dépasser les seuils normatifs des cycles de la vie classiques. À ce titre, Hildebrand (2003) propose une étude exploratoire intéressante. L’auteur a abordé la mobilité quotidienne d’États-Uniens et de Canadiens de plus de 60 ans en constituant des types de modes de vie selon les variables socio-économiques et d’équipement en transport, pour ensuite analyser les déplacements de chacun des groupes préalablement formés. Il constate la présence d’aînés aux modes de vie très peu mobiles et d’autres qui le sont davantage, voire beaucoup plus. Si de tels travaux s’intéressant au nombre de sorties effectuées par des personnes âgées ne peuvent rendre compte de leur mobilité dans l’espace géographique, ils ont néanmoins l’avantage de prendre en compte l’hétérogénéité des pratiques de mobilité des aînés.

15Les différences importantes à la fois au niveau des méthodes et des milieux de recherche des études recensées ne permettent pas de tirer de conclusions claires, d’une part, sur l’évolution des pratiques de mobilité dans la vieillesse et, d’autre part, sur l’expression géographique de tels changements. En effet, elles fournissent des informations fragmentaires sur les déplacements des personnes âgées, sur les moyens de transport qu’elles utilisent ainsi que sur leurs pratiques territoriales. Elles ouvrent néanmoins d’excellentes pistes d’hypothèses. Si l’espace d’action d’un individu vieillissant peut diminuer en superficie, certains indicateurs de la mobilité des aînés peuvent demeurer stables, notamment le nombre de sorties et le nombre de lieux visités sur le territoire.

16Peut-on maintenir les déplacements associés aux modes de vie construits pendant la vie active jusqu’au seuil des 70-80 ans? Ou bien, peut-on continuer de visiter certains lieux prioritaires, pouvant parfois être éloignés, en faisant diminuer les fréquences de sorties et le nombre de lieux visités? La littérature consultée pour cet article suggère les deux tendances, mais oblige également à adopter une perspective longitudinale de manière à saisir le véritable effet du vieillissement. Afin d’apporter des éléments de réponse, nous nous penchons sur l’évolution de la mobilité quotidienne d’un groupe de banlieusards vieillissants qui aspirait majoritairement à vieillir en banlieue en 1999 (Lord, 2004). Ces mêmes personnes ont été recontactées en 2006 de manière à explorer les questions suivantes :

  • Quelles sont les choix et les aspirations résidentiels des banlieusards près de 7 ans après la première consultation?

  • Quels sont les changements observables dans leurs pratiques de mobilité dans l’intervalle des deux consultations?

  • Quelles sont les caractéristiques physiques et fonctionnelles des lieux fréquentés sur le territoire (les nouveaux et ceux abandonnés)?

  • Quelles sont les différences dans les pratiques de mobilité selon les principales caractéristiques socio-économiques et de santé?

  • Quels sont les effets d’une perte d’autonomie ou d’une modification de la structure de ménage sur les pratiques de mobilité quotidienne?

Stratégie de recherche

Les données disponibles

  • 5 Des cent deux répondants de plus de 55 ans du projet la Banlieue revisitée qui été retenus, quatre- (...)
  • 6 Il s’agit des noms de répondants, de leurs adresses ainsi que leur numéro de téléphone en 1999.
  • 7 Cela a permis d’obtenir des renseignements sur les ménages ayant quitté leur bungalow, ainsi que ce (...)
  • 8 Cette dénomination des groupes d’âge sera utilisée pour le reste de l’article.
  • 9 L’âge est manquant en 1999 et en 2006 pour deux répondants.

17Les données analysées sont issues du projet la Banlieue revisitée du Groupe interdisciplinaire de recherche sur les banlieues (GIRBa) (Fortin et al., 2002) dans lequel cent soixante-treize banlieusards de l’agglomération de Québec au Canada ont été rencontrés en 1999. Les entrevues des cent deux répondants âgés de 55 à 82 ans5 en 1999 répartis entre cinquante-quatre hommes et trente trois femmes ont été utilisées. Quatre-vingt-onze des cent deux ont été retracés par l’entremise des informations sur les répondants de 1999 détenues6 par le GIRBa et croisées avec des bases de données à accès public sur Internet. Parmi les quatre-vingt-onze sujets retracés et contactés par téléphone7, cinquante-sept ont participé à la recherche de 2006, soit un taux de réponse de 62 % (57/91). Ce taux est inégal selon les trois groupes d’âge formés en 1999 : les jeunes retraités (55-64 ans), les seniors (65-74 ans) et les anciens (plus de 75 ans)8. Deux tiers (23/37) des jeunes retraités et trois quarts (24/32) des seniors ont participé aux deux consultations, mais seulement huit 8 des dix-neuf anciens9. Une santé perçue comme trop fragile est la principale raison de refus.

18Les données de 1999 proviennent d’entretiens qualitatifs menés en personne au domicile des répondants. La collecte des données de 2006 s’est effectuée avec un questionnaire postal auto-administré de quarante-cinq questions. Une enveloppe de retour prépayée et pré-adressée a été acheminée aux répondants. Le rappel téléphonique a permis de noter le consentement des répondants à participer à la recherche ainsi qu’à confirmer leur adresse postale. Les réponses au questionnaire ont permis de mettre à jour, en référence aux entretiens de 1999, les aspirations résidentielles des répondants, leurs habitudes de déplacements, leurs lieux de consommation visités sur le territoire ainsi que leur niveau d’autonomie.

Méthode de recherche

  • 10 L’outil compte sept questions simples de type oui / non et pouvant être posées au téléphone ou en q (...)

19Trois étapes d’analyse ont été menées. Premièrement, les situations socio-économique et résidentielle du groupe d’aînés en 2006 ont été comparées à celles de 1999. Cette étape a permis, d’une part, d’identifier les répondants qui ont déménagés, ceux pour qui la situation familiale s’est modifiée (décès, cohabitation, etc.) et ceux qui ont vu leur niveau d’autonomie décliner, et d’autre part, de comparer leurs aspirations de 1999 à leurs comportements résidentielles effectifs en 2006. Le niveau d’autonomie des répondants a été évalué par l’indice PRISMA-7 (Raîche et al., 2007) servant à repérer les individus susceptibles de nécessiter des soins à domicile10. Deuxièmement, les pratiques de mobilité des répondants sur le territoire ont été analysées. Pour ce faire, une typologie de mobilité construite avec les données de 1999 (Lord et al., à paraître) a été réappliquée aux mêmes répondants en 2006. La classification de 2006 comparée à celle de 1999 a permis d’observer le changement d’un individu d’un type à un autre. Troisièmement, les espaces d’action des individus ayant changé de type de mobilité ont été explorés qualitativement. Pour chacun d’entre eux, l’espace d’action cartographié de 2006 a été superposé sur celui de 1999. Ces cartes individuelles ont été explorées pour tenter de comprendre les facteurs d’augmentation ou de diminution de la mobilité en lien avec l’évolution des quartiers des répondants (entre autres, fermeture et ouvertures de services) ainsi que de l’évolution de leur autonomie et de leurs caractéristiques socio-économiques.

  • 11 Il s’agit des lieux suivants : épicerie, pharmacie, quincaillerie, clinique médicale, station-servi (...)
  • 12 Ce module a par ailleurs été utilisé pour d’autres recherches s’intéressant aux espaces d’action in (...)

20La typologie de mobilité est issue d’indices d’analyse centrographique calculés à partir de la distribution spatiale de neuf types d’établissements de commerces et de services d’usage routinier11. Comme en 1999, chacun des établissements visités par le répondant en 2006 a été localisé dans un SIG et associé à une fréquence d’usage ainsi qu’à un moyen de transport. Ces lieux, ainsi que les domiciles des répondants, ont été géoréférencés à l’échelle du bâtiment. Les analyses centrographiques ont été menées à l’aide du module MapStat (2.01) développé par Marius Thériault pour le logiciel de SIG MapInfo©12. Les distributions spatiales individuelles des établissements fréquentés ont permis de calculer pour chaque personne des indices de dispersion spatiale et de tendance centrale (Kellerman, 1981 ; Levine, 2006). Le lieu de chaque commerce a été pondéré par le nombre de visites du répondant sur une base annuelle. Ces indices ont été, d’une part, croisés avec les caractéristiques socio-économiques des répondants, et d’autre part, étudiés à l’aide d’une analyse en composantes principales exploratoire. Des statistiques descriptives ont été effectuées de manière à relever des tendances à l’échelle du groupe de répondants. Selon la nature des variables (nominales ou d’échelle), des tests du Khi-deux, de différence de moyennes (Anova et test du t) ainsi que des corrélations ont été réalisés.

21Le tableau 1 présente la typologie de mobilité développée en 1999 qui compte quatre types répartis selon deux composantes mutuellement indépendantes : 1) dissémination de la mobilité et 2) étalement de la mobilité (Lord et al., à paraître). Le croisement des deux composantes orthogonales selon la position du répondant par rapport à la moyenne du groupe (inférieur ou supérieur) permet une classification en quatre types : 1) domocentré, 2) voisineur, 3) pérégrinateur et 4) hypermobile. Le domocentré possède un espace d’action limité formé par un nombre restreint de lieux visités sur le territoire. Le voisineur compte aussi un espace d’action réduit, mais cet espace est constitué par un nombre plus importants de lieux visités sur le territoire. Les pérégrinateurs et les hypermobiles possèdent quant à eux des espaces d’action plus vastes, les premiers concentrant leurs déplacements dans quelques lieux tandis que les deuxièmes les disséminent en plusieurs endroits.

Tableau 1 : Typologie de mobilité

22En plus de structurer les pratiques de mobilité des répondants en 1999, cette typologie de mobilité a également servi à développer trois hypothèses de travail sur l’évolution de chacun des types qui la compose. Premièrement, la stabilité résidentielle en banlieue à laquelle aspiraient les répondants en 1999 risque de les entraîner à modifier leurs pratiques de mobilité vers une baisse des déplacements (cf. passer à un type moins mobile). L’analyse qualitative des modes de vie de 1999 avaient d’ailleurs révélé la présence de plusieurs rapports à l’automobile au sein des domocentrés, ce qui suggérait que les répondants de ce type aient possiblement appartenu précédemment à un autre type (Lord et al., à paraître). La perspective sociale invitait également à considérer une deuxième hypothèse de nature géographique. En effet, l’adaptation des pratiques de mobilité des pérégrinateurs et les hypermobiles risque d’être plus difficile. Pour demeurer en banlieue, les répondants (en 1999) de ces deux types doivent recomposer l’ensemble de leur quotidien plutôt qu’adapter leurs pratiques de mobilité comme l’envisagent les voisineurs et les domocentrés. Enfin, l’âge chronologique ne semble ne pas être un déterminant de ce processus d’adaptation de la mobilité, peu de relations claires avaient été observées (composantes d’étalement et de dissémination). À cet égard, les modes de vie semblaient être un facteur davantage explicatif.

Le groupe de banlieusards et leurs banlieues

  • 13 Pour une présentation exhaustive des quartiers des répondants, consulter Vachon et Luka (2002).

23Les répondants résident dans des quartiers des premières banlieues qui entourent typiquement les quartiers centraux des agglomérations nord-américaines (Puentes et Warren, 2006) et australiennes (Patterson, 1997). Ces suburbs sont celles où domine le bungalow – maison unifamiliale détachée de plain-pied. Ces quartiers ne doivent pas être confondus avec les grands ensembles européens, il s’agit de milieux exclusivement résidentiels de faible densité où domine la classe moyenne13.

  • 14 En 2006, les jeunes retraités sont maintenant âgés de 61-70 ans, les seniors de 71-80 ans et les an (...)

24Le groupe de banlieusards étudié compte plus d’hommes que de femmes : quarante répondants contre dix-sept répondantes. La situation résidentielle du groupe de banlieusards se caractérisait en 1999 par une grande stabilité. Une majorité habitait leur maison depuis plus de 30 ans (37/57). En 2006, les jeunes retraités14 comptent dix-huit hommes et cinq femmes ; un seul n’a pas de permis de conduire. Les seniors comptent dix-sept hommes et sept femmes ; deux ne conduisent pas. Enfin, les anciens comptent trois hommes et cinq femmes ; un ancien n’a pas de permis de conduire. La majorité (43/57) des banlieusards rencontrés a un conjoint et plus du tiers possède, en 2006, un revenu entre 30 000 $ et 50 000 $. De manière générale, les cinquante-sept répondants sont demeurés auto-mobiles, seulement deux ont perdu leur permis de conduire depuis 1999. Aucun sujet n’utilise régulièrement le transport en commun, même ceux qui ne conduisent pas. Enfin, deux répondants ont refusé de dévoiler leur âge.

25L’article repose sur un groupe d’aînés qui habitaient un bungalow en banlieue en 1999, et non sur un échantillon aléatoire. Les résultats de l’article ne visent pas la généralisation des observations à l’ensemble des aînés de banlieue, mais plutôt le transfert de méthodes et de savoirs à des contextes socioculturels équivalents. C’est pourquoi les manipulations de données objectives et les statistiques descriptives produites ne s’appliquent qu’à l’échelle du groupe d’enquêtés uniquement. Les statistiques présentées le sont à titre indicatif, essentiellement pour guider l’interprétation et non pour porter des conclusions généralisables. Ces limites doivent cependant être relativisées en raison de l’originalité et la rareté des connaissances produites par un suivi de près de sept années pour un groupe d’individus âgés.

Résultats

La situation résidentielle en 2006

Vieillir en banlieue, la réalité d’une majorité

  • 15 Le retour téléphonique a permis d’obtenir de l’information sur le lieu de résidence des répondants (...)

26La stabilité résidentielle à laquelle aspirait le groupe de banlieusards rencontrés en 1999 se poursuit en 2006. Sur les quatre-vingt-onze répondants retracés par téléphone, soixante-dix résident toujours à la même adresse.15 Quinze autres ont déménagé entre les deux consultations, soit un sur six, dont trois en résidence pour personnes âgées avec services. Onze sujets n’ont pu être rejoints en 2006. Six décès ont été constatés, dont cinq au domicile de 1999. Cette stabilité renforce les résultats des recherches transversales montrant que les aînés aspirent à vieillir à domicile le plus longtemps possible (AARP, 2000 ; Lord, 2004 ; Wagnild, 2001).

27Des cinquante-sept répondants qui ont retourné le questionnaire postal, six ont déménagé et cinquante et un habitent toujours dans leur bungalow de 1999. La comparaison de la situation résidentielle de 1999 à celle de 2006 montre toutefois certains décalages entre les aspirations et les choix effectifs. D’une part, des cinquante-deux banlieusards toujours en place qui ne désiraient pas déménager en 1999, 40 maintiennent leur décision en 2006. Cependant, sept ont changé d’avis et pensent déménager à plus ou moins long terme. Cinq répondants qui n’envisageaient pas un déménagement en 1999 ont néanmoins quitté leur bungalow depuis, dont trois pour des raisons de santé. D’autre part, des cinq banlieusards qui affirmaient en 1999 vouloir déménager, seulement l’un d’eux n’habite plus sa maison de 1999, les quatre autres réfléchissent toujours. Ces résultats correspondent à ceux des études généralisables montrant qu’un déménagement est plus probable au tournant de la prise de la retraite que plus tard (Longino, 2002 ; Ostrovsky, 2005). La perspective longitudinale confirme également que la décision de déménager peut prendre plusieurs années (Krout et al., 2003).

  • 16 Les répondants avec au moins une des situations suivantes : limitations d’autonomie du répondant, l (...)
  • 17 Notons que cette observation ne peut s’appliquer aux répondants n’ayant pu être à nouveau contactés (...)

28Les difficultés d’accès à la mobilité quotidienne, notamment pour ceux qui présentaient des problèmes d’autonomie en 1999, ne semblent pas avoir influencé les choix résidentiels de 2006. Les répondants qui ont déménagé ne sont pas ceux qui avaient des problèmes d’autonomie il y a 6 ans, ni ceux ayant un accès limité à une voiture. Des onze aînés avec une autonomie révélée comme limitée ou gravement problématique en 1999, seulement deux n’habitent plus dans leur bungalow en 2006. Qui plus est, les dix-huit personnes pour qui la situation semblait la plus problématique16 en 1999 sont toujours en place17. Pour ce qui est des six répondants déménagés, trois ont changé de domicile suite à l’arrivée subite de la maladie, trois autres en bonne santé ont opté pour un appartement en banlieue sans que la mobilité quotidienne joue un rôle dans leur relocalisation.

Une auto-mobilité qui persiste

29L’utilisation de la voiture pour les déplacements quotidiens est demeurée stable au cours des six années. Tout comme en 1999, l’automobile est utilisée dans une proportion d’environ huit déplacements sur dix 2006 (77,1 % vs 80,8 %). Le transport en commun est occasionnellement emprunté par huit répondants, dont sept sans problème d’autonomie. Le taxi est un moyen de transport utilisé au moins une fois par mois chez cinq des cinquante-sept sujets, tous sont limités dans leur autonomie. Ainsi, près de 6 ans plus tard, aucun des cinquante-sept répondants n’a modifié substantiellement ses habitudes de déplacement.

Évolution des pratiques de mobilité

30Le tableau 2 présente les indices des analyses centrographiques réalisées avec les distributions spatiales individuelles des lieux fréquentés par les répondants en 1999 et en 2006. Le nombre total de lieux fréquentés occasionnellement par le groupe est demeuré stable avec une moyenne de 12,6. Le nombre de lieux fréquentés hebdomadairement a par contre augmenté de 13 %, passant d’une moyenne de 4,6 en 1999 à 5,2 en 2006. Cela signifie que le nombre de lieux fréquentés plus rarement, moins d’une fois par semaine, a diminué. La superficie moyenne des ellipses de dispersion a rétrécit dans l’intervalle des six années, passant de 4,3 km2 en moyenne en 1999 à 3,6 km2 en 2006, soit une réduction de plus de 16 % à l’échelle du groupe. Ces observations suggèrent une diminution des déplacements les plus rares, qui sont également souvent les plus loin du domicile du répondant. Cela dit, tout comme observé dans la littérature, une grande variabilité de la mobilité est visible entre les groupes d’âge.

Stabilité des habitudes de sortie

31Les jeunes retraités fréquentent environ le même nombre d’établissements, avec 13,6 lieux en 2006 contre 13,2 en moyenne en 1999. Si le nombre moyen de lieux qu’ils visitent occasionnellement est aussi stable pour les jeunes retraités, il augmente chez les seniors, avec près de 13 % de plus qu’en 1999. Si l’on considère seulement les lieux fréquentés sur une base hebdomadaire, tant les jeunes retraités et que les seniors ont vu ce nombre moyen augmenter avec une hausse de près de 12 % et 20 % respectivement. L’augmentation substantielle observée pour les seniors est relativement surprenante. À la lumière de la littérature, elle pourrait s’expliquer par la majorité d’hommes (17/24) dans le groupe, ces derniers davantage mobiles que les femmes. À l’inverse, les anciens ont considérablement diminué la fréquentation des établissements proposés, avec une baisse de près de 40 % passant de 13,2 en moyenne en 1999 à 8,0 en 2006. Cependant, aucune diminution n’est observable sur une base hebdomadaire, les anciens ont maintenu une moyenne de 3,9 lieux dans l’intervalle. La diminution importante du nombre de déplacement passé les 70 ans est en accord avec la littérature, même si le très faible nombre de répondants dans le groupe doit être interprété avec précautions. Notons que si l’on considère les refus de participer au volet de la recherche en 2006 pour des raisons de santé, cette tendance risque de s’accentuer.

Tableau 2 : Mesures de dispersion spatiale des pratiques de mobilité par groupes d’âge pour 2006

32En 1999, on n’observait aucune tendance entre le nombre moyen d’établissements fréquentés et les groupes d’âge. Six années plus tard, les plus âgés se démarquent assez clairement des deux autres groupes (F : 2,493 / p < 0,092). La baisse de 39 % entre 1999 et 2006 du nombre moyen d’établissements fréquentés occasionnellement par les anciens montre également une tendance à la baisse (F : 3,201 / p < 0,049) qui n’est pas observée chez les jeunes retraités et les seniors. Cette baisse ne s’applique toutefois pas aux lieux fréquentés hebdomadairement et ce, même chez le plus vieux du groupe.

33Tout comme en 1999, les répondants limités dans leur autonomie en 2006 visitent en moyenne moins de lieux sur le territoire que ceux en bonne santé (F : 9,297 / p < 0,004). Ces sujets fragilisés ont aussi vu le nombre de lieux visités entre 1999 et 2006 diminuer davantage que ceux n’ayant pas de problème en ce sens (F : 10,939 / p < 0,002). Aucune tendance à l’échelle du groupe n’est toutefois observable selon le revenu familial, le genre et le statut du ménage ou le passage des 70 ans et ce, tant au niveau du nombre d’établissements visités occasionnellement sur le territoire et de ceux fréquentés hebdomadairement.

Réduction et transformation des ellipses de dispersion

34La superficie moyenne des ellipses de dispersion des cinquante-sept répondants est passée de 4,3 km2 en 1999 à 3,6 km2 en 2006. Cette superficie présente des différences entre les groupes d’âge (F : 6,355 / p < 0,003). Alors qu’en 2006 les jeunes retraités ont une ellipse de 4,6 km2 et les seniors de 3,7 km2, les anciens en ont une de seulement 0,6 km2. Les jeunes retraités ont légèrement augmenté la superficie de leur ellipse de près de 7 %, alors que les seniors et les anciens l’ont réduit de près de 14 % et de plus de 86 % respectivement. La diminution par les anciens de la superficie de leurs ellipses suggère une tendance (F : 2,609 / p < 0,083), ce qui n’est pas le cas des deux autres groupes d’âge. Le niveau d’autonomie (F : 7,232 / p < 0,009) et le genre (F : 4,775 / p < 0,033) sont des variables qui semblent associées à la superficie moyenne des ellipses du groupe de répondants. Ni le passage du seuil des 70 ou 75 ans, ni le revenu du ménage ne révèlent toutefois de tendances avec la superficie des ellipses.

35La distance euclidienne entre le domicile et le centre de gravité de l’ellipse a diminué de plus de 34 % pour l’ensemble des sujets. Alors que cette distance est restée pratiquement la même chez les anciens, elle a considérablement baissé chez les jeunes retraités et les seniors avec respectivement près de 23 % et 33 % de diminution. Seuls le genre et le niveau d’autonomie suggèrent des tendances. Les femmes plus que les hommes (F : 3,685 / p < 0,060) et les répondants fragilisés comparativement à ceux non limités (F : 4,906 / p < 0,031) ont vu leur ellipse se rapprocher davantage de leur domicile. Enfin, les dispersions spatiales des lieux fréquentés sur le territoire par les banlieusards âgés ont eu tendance à se rapprocher de la forme circulaire. L’indice de forme des ellipses a diminué au cours des six années en passant d’une forme anisotropique (indice de 2,6) à une autre davantage isotropique (indice de 1,7).

36Ces résultats sur les indices centrographiques précisent les études consultées. Ils nuancent les paradoxes observés sur l’augmentation des déplacements des aînés et la diminution des espaces d’action. D’un part, la baisse du nombre de lieux visités occasionnellement sur le territoire par le groupe et, d’autre part, le maintien ou même l’accroissement de ceux fréquentés hebdomadairement, tout en étant conjugués à la superficie des ellipses, viennent préciser nos hypothèses de travail sur l’évolution de la mobilité dans la vieillesse. Ainsi, les déplacements fréquents et près du domicile sont relativement stables ou en augmentation, alors que les déplacements plus rares et plus loin sont en diminution. Cette dynamique observée longitudinalement pour notre groupe pourrait expliquer la contraction des espaces d’action observés dans la littérature, malgré une augmentation des déplacements.

Évolution des espaces d’action

  • 18 Ne disposant pas d’un échantillon paramétré, l’analyse en composantes principales (ACP) est explora (...)
  • 19 N’ont été retenues que les composantes ayant une valeur propre supérieure à 1,0.

37Le tableau 3 montre les résultats d’une analyse en composantes principales exploratoire18 réalisée à partir des données de 2006, mais avec les mêmes indices d’analyse centrographique qu’en 1999 (Lord et al., à paraître). On y observe la même structure factorielle qu’en 199919 : 1) une composante de dissémination (38,6 % de la variance totale) et 2) une composante d’étalement (21,2 % de la variance totale).

38Le croisement des composantes principales avec les variables socio-économiques des répondants confirme partiellement les hypothèses de 1999 à l’effet que l’âge n’explique pas à lui seul la mobilité des aînés de banlieue. La comparaison 1999-2006 montre des tendances émergeant entre les groupes d’âge et les deux composantes : la dissémination (F : 2,463 / p < 0,063) et l’étalement (F : 2,723 / p < 0,075). Les groupes les plus âgés disséminent et étalent moins leurs pratiques de mobilité sur le territoire. Le même constat est également relevé pour les répondants limités dans leur autonomie. Comparativement à ceux qui n’ont pas de problèmes d’autonomie, les sujets fragilisés disséminent (F : 4,933 / p < 0,017) et étalent (F : 11,054 / p < 0,002) moins leurs déplacements sur le territoire. Quant au genre, seule la composante de l’étalement suggère une tendance. Comme observé dans la littérature, les femmes du groupe s’éloignent moins de leur domicile que les hommes (F : 6,120 / p < 0,016).

Variables

Composante de dissémination spatiale

Composante d’étalement

spatial

Nombre moyen d’établissements fréquentés occasionnellement par le répondant

0,719

0,387

Nombre moyen d’établissements fréquentés hebdomadairement par le répondant

0,660

0,129

Superficie (km2) de l’ellipse de dispersion

0,494

0,511

Distance euclidienne (km) entre le centre de gravité de l’ellipse de dispersion et le domicile

-0,024

0,880

Indice de forme de l’ellipse de dispersion (oblongitude : rapport axe majeur / mineur)

-0,710

0,299

Méthode d'extraction : analyse en composantes principales. Méthode de rotation : Varimax avec normalisation Kaiser.

Rotation a convergé en 3 itérations.

Tableau 3 : Résultat d’analyse exploratoire en composantes principales en 2006

39Ces banlieusards qui s’éloignent moins de leur domicile en 2006 qu’en 1999 ont néanmoins conservé stable la dissémination de leur mobilité. Cela confirme partiellement deux hypothèses formulées à partir des données de 1999. Premièrement, alors que la composante de l’étalement ne semblait pas associée aux groupes d’âge, ni à l’âge en donnée continue, elle le devient lorsqu’on intègre les données de 2006. Deuxièmement, même si les déplacements des cinquante-sept banlieusards s’effectuent dans une plus grande proximité, ils semblent conserver leurs caractéristiques spatiales, puisque la composante de dissémination ne montre pas de tendance selon l’âge. Ces résultats sont cohérents avec la littérature recensée. Les modes de vie en termes d’habitudes de sorties semblent se maintenir malgré le vieillissement.

40Le tableau 4 montre les distributions des répondants selon la typologie en 1999 et celle de 2006. Tous les types ont à la fois perdu et gagné de nouveaux sujets. Cela vient en partie contredire ce qui avait été envisagé à partir des données de 1999, où nous supposions une réduction de la mobilité et une transition des répondants vers le type le moins mobile, soit les domocentrés. Cela dit, ce sont les transitions individuelles qui constituent le principal intérêt d’un tel suivi longitudinal.

41Dix-sept répondants ont conservé le même type de mobilité, une majorité de ceux-ci (15/17) n’a toujours pas de problème d’autonomie. Quinze sujets ont pour leur part augmenté leur mobilité, dont treize domocentrés en 1999, leurs cas ne montrant aucune diminution des deux composantes et au moins l’augmentation de l’une ou de l’autre. À l’inverse, quinze personnes ont diminué leur mobilité, soit la diminution des deux composantes ou la stabilité de l’une et la baisse de l’autre. Chez neuf derniers répondants, on observe une altération de leur mobilité sans toutefois pouvoir affirmer que celle-ci a augmenté ou diminué. Il s’agit de trois voisineurs en 1999 dont l’étalement de la mobilité a augmenté mais dont la dissémination des déplacements a diminué : ils sont pérégrinateurs en 2006. À l’inverse, six pérégrinateurs en 1999 ont diminué l’étendue de leur mobilité mais augmenté sa dissémination sur le territoire pour devenir voisineurs en 2006.

Tableau 4 : Distributions des répondants selon les typologies de 1999 et de 2006

42Une analyse cartographique qualitative de l’évolution des espaces d’action a permis d’explorer les facteurs d’influence des pratiques spatiales des répondants. L’hypothèse que les facteurs d’augmentation de la mobilité sont de nature socio-spatiale semble se dégager. À l’inverse, les facteurs de diminution de la mobilité semblent plutôt liés, d’une part, à une détérioration du niveau d’autonomie du répondant, et d’autre part, au changement des modes de vie.

Facteurs d’augmentation de la mobilité dans la vieillesse

  • 20 Certains arrondissements de la ville de Québec, comme ceux de Beauport et de Charlesbourg, sont par (...)

43Premièrement, l’évolution de la structure urbaine de l’agglomération de Québec rend compte de plusieurs cas d’augmentation. Les quartiers de résidence de ces banlieusards ont vu plusieurs commerces et services cesser leurs activités dans l’intervalle des six années du suivi, notamment les épiceries, les boutiques spécialisées en alimentation, les quincailleries et les centres de services bancaires20. Cette délocalisation de tels établissements s’est réalisée principalement vers les zones de type grandes surfaces situées aux abords des autoroutes ceinturant les banlieues étudiées (Biba et al., 2008 ; Mercier, 2007). Les répondants âgés des secteurs concernés ont adapté leurs pratiques de mobilité de manière à rejoindre les établissements qui ne sont maintenant plus disponibles à proximité. Ce type d’adaptation s’est réalisé indépendamment de l’arrivée de limitations d’autonomie. Il rend compte des transitions les plus drastiques, celles impliquant le changement des deux composantes de la mobilité (ex. domocentré à hypermobile). La carte 1 illustre un cas représentatif de ce type d’augmentation.

Carte 1 : Exemple d’une augmentation importante de la mobilité sur le territoire

44Deuxièmement, des facteurs liés aux habitudes de sortie et aux préférences en matière de déplacements rendent compte d’autres cas d’augmentation de la mobilité. Ces transitions plus limitées impliquent la modification d’une composante de la mobilité (ex. passage du type domocentré à celui de voisineur ou du type pérégrinateur à hypermobile). Ces transitions sont essentiellement masculines et concernent les répondants les plus jeunes du groupe. De tels cas d’augmentation correspondent à des observations comme celles de Rosenbloom (2003) à l’effet que les jeunes retraités, auto-mobiles et en bonne santé, multiplient les déplacements quotidiens. Ces transitions révèlent également le caractère structurant dans la mobilité des personnes âgées des centres commerciaux (Daris, 2003). En effet, ces milieux de proximité, protégés des intempéries et universellement accessibles, polarisent un grand nombre de déplacements des sujets ayant augmenté leur mobilité. La carte 2 présente un cas représentatif de ce type d’augmentation.

45Troisièmement, pour un nombre limité de répondants, l’arrivée de problèmes d’autonomie chez le répondant lui-même ou chez son conjoint a également contribué à augmenter la mobilité. Certains sujets fréquentent maintenant un plus grand nombre d’établissements de santé ou encore un lieu spécifique localisé à l’extérieur de leur espace d’action de 1999. La présence d’équipements de soins spécialisés (ex. cliniques spécialisées) peut ainsi contraindre à se déplacer davantage à un âge avancé.

Carte 2 : Exemple d’une augmentation limitée de la mobilité sur le territoire

Facteurs de diminution de la mobilité dans la vieillesse

46Premièrement, des problèmes d’autonomie fonctionnelle témoignent des cas de baisse considérable de mobilité. Les six passages des types hypermobiles ou pérégrinateur au type domocentré sont tous marqués par une dégradation de l’autonomie du répondant depuis 1999. Cela s’observe également par le déménagement en résidence pour personnes âgées pour trois de ces six cas. Ces transitions impliquent notamment une baisse de l’étendue de la mobilité, qu’elle soit combinée ou non à la composante de la dissémination. La carte 3 expose un exemple représentatif d’un sujet passé de l’hyper-mobilité à une situation domocentrée.

Carte 3 : Exemple d’une diminution importante de la mobilité sur le territoire

47Deuxièmement, pour huit des dix répondants ayant diminué leur mobilité, cette baisse s’observe également avec l’arrivée de limitations d’autonomie (ex.: trois des sept voisineurs maintenant domocentrés en 2006). Ces passages à un type moins mobile ne semblent toutefois pas uniquement reliés à cette variable. Ces cas montrent que l’on modifie certains lieux visités au profit d’autres moins éloignés sur le territoire, mais que l’on polarise également les déplacements vers des espaces offrant une mixité de fonctions en un seul endroit. Les centres commerciaux de quartier semblent encore jouer un rôle central dans ces pratiques spatiales. Les cas de diminution observés longitudinalement confirment en partie ce qui avait été anticipé de manière transversale en 1999. L’adaptation de la mobilité quotidienne s’effectue graduellement chez certains sous-groupes de répondants (Lord & Luxembourg, 2006). La carte 4 montre un exemple représentatif de ce type de transition.

Carte 4 : Exemple d’une diminution limitée de la mobilité sur le territoire

Discussion

48La stabilité résidentielle observée chez le groupe d’aînés rencontrés témoigne, près de 7 ans plus tard, de la volonté d’adaptation affirmée lors des entrevues qualitatives initiales en 1999 (Lord, 2004). L’articulation des stratégies d’adaptation de la mobilité que ces répondants avaient envisagées pour se maintenir en place se voit confirmée.

49L’évolution des pratiques de mobilité sur le territoire de ce groupe d’aînés permet de constater que le processus d’adaptation de la mobilité n’est pas uniquement marqué par la baisse, mais également par la stabilité et l’augmentation des déplacements. La mobilité quotidienne du groupe a été modulée par l’évolution à la fois des territoires, de leur autonomie et de leur mode de vie. Fondamentalement, et comme le reste de la population, ces personnes âgées se sont adaptés à l’évolution de leur ville. Par leur stabilité résidentielle et leurs aspirations de 1999 et de 2006, ces banlieusards témoignent de préférences pour la banlieue, et ce, qu’ils soient plus ou moins mobiles. À ce titre, une étude plus approfondie du sentiment de satisfaction résidentielle serait pertinente pour mieux appréhender l’expérience de la mobilité en banlieue dans la vieillesse. En ce sens, ces trajectoires plutôt "sans problème" d’individus en relative bonne santé et auto-mobiles – seulement deux des cinquante-sept répondants ont perdu leur permis de conduire – ne doit pas masquer la présence, et assurément au sein même de ces banlieues, d’individus moins favorisés en ce sens.

50La perspective longitudinale ici développée fournit un éclairage nouveau sur la mobilité quotidienne dans la vieillesse. Bien qu’elle confirme une tendance générale à la réduction des pratiques de mobilité, notamment lorsque centre commerciaux et équipements de santé sont à proximité, les six années du suivi ont permis de mieux définir la variabilité individuelle de la mobilité dans la vieillesse observée dans la littérature. En ce sens, nos résultats renforcent la pertinence de l’analyse de la mobilité à l’échelle individuelle et sous l’angle des modes de vie, en y incluant d’autres types de pratiques, sociales notamment.

51L’évolution des déplacements de ce groupe de banlieusards renforce l’hypothèse que leurs pratiques spatiales s’inscrivent davantage en continuité avec les rapports à la mobilité en général, et à l’auto-mobilité en particulier. L’inertie des rapports à l’espace construits pendant la vie active, en termes de préférences et de routines, mais également au niveau de la connaissance et de la capitalisation des potentialités de mobilité (Kaufmann, 2008), ne doit pas être négligée. En ce sens, l’article renforce l’hypothèse que la mobilité dans la vieillesse n’est pas insérée dans une dynamique régressive nécessairement induite par l’âge. Recadré dans la problématique plus large du vieillissement à domicile (Lord, 2004), nous en arrivons également au constat que c’est peut-être moins l’évolution de pratiques de mobilité que nous avons pu observer que l’évolution des stratégies globales s’articulant à travers la mobilité, mais visant la conservation du "mode de vie banlieusard" avec les significations d’autonomie et d’indépendance qui lui sont associées.

52Si la mobilité du groupe d’aînés est globalement moins étendue sur le territoire en 2006 qu’en 1999, la relative stabilité de la composante de dissémination de la mobilité vient nuancer le repli spatial souvent observé mais peu interprété. À la lumière de ces changements, nous pouvons questionner les notions de choix et de contraintes. L’adaptation de la mobilité observée chez ces aînés suggère des préférences pour le vieillissement en banlieue. Face à cela, l’obligation éventuelle pour ces personnes de s’en remettre aux services disponibles à proximité impliquant une possible perte de diversité et de qualité des services doit également être soulevée. Cela dit, fondamentalement, en banlieue tant la proximité que l’accessibilité demeurent d’abord auto-mobiles.

53Ainsi, quelles que soient les caractéristiques de la mobilité du groupe, celle-ci est restée très fortement automobile. C’est peut-être aussi ce qui explique la relative stabilité de la composante de la dissémination. Tout comme l’observent Siren & Blomqvist (2004), l’accès à la voiture nivèle les problèmes de déplacement. L’hypothèse à l’effet que l’automobile constitue un capital de mobilité sur lequel repose la stabilité résidentielle se voit renforcée, du moins pour le groupe de répondants étudié. Ce capital risque cependant d’être l’une des deux faces d’une médaille, l’autre étant la dépendance à la voiture, particulièrement dans le contexte où peu d’autres moyens de transport ont été pratiqués durant la vie active. Cela nous permet ainsi de préciser le véritable enjeu du vieillissement en banlieue : qu’arrive-t-il lorsque l’adaptation de l’auto-mobilité n’est plus possible?

54Pour terminer, si plusieurs individus âgés ont montré qu’il était possible d’augmenter ou de diminuer leur mobilité sur le territoire, cela n’exprime en rien comment sont vécus les changements observés. Qui plus est, la mobilité analysée ici est celle liée aux déplacements de consommation. Bien que la littérature montre que cette dimension occupe une place centrale dans le quotidien d’une personne âgée (Benlarech et al., 1998 ; Rosenbloom, 2003), elle n’est surtout pas exclusive. D’autres motifs de déplacements, notamment pour constituer des espaces d’action thématiques ou synthétiques, gagneraient à être investigués selon la méthode ici développée.

Conclusion

55Cet article s’est intéressé à l’évolution des pratiques de mobilité d’un groupe de cent deux banlieusards de l’agglomération de Québec au Canada entre 1999 et 2006, ces derniers étant âgés 61 à 90 ans en 2006. Adoptant une perspective longitudinale et exploratoire, c’est par une typologie de mobilité que les pratiques spatiales des répondants ont été comparées à six années d’intervalle. La contribution principale de l’article réside dans la perspective à la fois individuelle et longitudinale pour le développement d’une typologie de mobilité. Cette dernière a permis de constater comment des individus associés à un certain type de mobilité ont vieilli et ont transformés leurs pratiques du territoire. Les deux composantes de la mobilité considérées, l’étalement et la dissémination des déplacements, ont permis de préciser certaines connaissances à ce jour fragmentaires sur la mobilité dans la vieillesse. Nos analyses suggèrent que l’augmentation de la mobilité dans le grand âge provient de facteurs socio-spatiaux, notamment la dispersion des services sur le territoire. Les dimensions individuelles, notamment l’âge et le niveau d’autonomie, semblent expliquer une réduction.

56Quant à la portée pratique d’une telle étude, elle montre que, fondamentalement, les banlieues pavillonnaires investiguées ne sont pas des obstacles incontournables pour le vieillissement. Si les aménageurs ont moins d’emprise sur les facteurs provoquant une diminution de la mobilité relevés dans cet article, en étant principalement associée à la santé et aux préférences de l’individu, ils ont néanmoins la possibilité d’intervenir sur ceux qui la font augmenter. À l’heure des grands enjeux environnementaux, ils gagneraient à garantir la présence et l’accessibilité dans des conditions sécuritaires (mobilier urbain, éclairage, etc.) de services de proximité. De tels services, dont la pérennité n’est pas assurée face à la concurrence des grandes surfaces (Biba et al., 2008), sont par ailleurs présents, proches et accessibles dans les banlieues investiguées. En outre, le support de tels équipements représente une voie d’intervention relativement simple qui répondrait à des besoins en mobilité clairement révélés par nos travaux. Qui plus est, cela dépasse largement la problématique de l’aménagement des villes et du vieillissement des populations. Une telle consolidation rejoint davantage la notion de développement durable où la diminution de la dépendance à la voiture concerne les vieux comme les plus jeunes.

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Notes

1 La mobilité quotidienne se réfère aux déplacements quotidiens d’un individu dans un espace géographique habituel (Orfeuil, 2002). Elle s’observe selon les programmes d’activités d’un individu / ménage générant des mouvements dans l’espace géographique entre des origines et des destinations.

2 L’auto-mobilité se réfère à l’usage généralisé de l’automobile comme moyen de déplacement.

3 Plusieurs concepts font l’objet d’analyses et de débats, comme par exemple l’espace de vie (Courgeaux, 1988), l’espace d’action (Disjt, 1999) et l’espace vécu (Di Méo, 1991), avec la distinction d’aspects plus fondamentaux comme la différenciation entre le territoire (collectif) et l’espace (individuel) (Boulahbal, 2000). Puisque les dimensions de l’appropriation et de l’appartenance ne font pas l’objet de cet article, nous retenons concept de l’activity space défini ci-après.

4 Le concept de mode de vie se réfère aux pratiques (ou groupes de pratiques) réalisées par un individu unique. Ces pratiques peuvent être regroupées indépendamment de leurs orientations et de leurs finalités, l’individu leur donnant un sens qui lui est propre (Juan, 1991, 23). Les pratiques ici étudiées sont spatiales, elles s’observent dans un espace géographique. Organisées en séquence, l’organisation et la routinisation des pratiques permettent la structuration de la vie quotidienne (Bourdin, 2005).

5 Des cent deux répondants de plus de 55 ans du projet la Banlieue revisitée qui été retenus, quatre-vingt-sept entrevues ont fait l’objet des analyses de 1999. Quinze répondants avaient alors été exclus (dix étaient encore des travailleurs, cinq autres avaient refusé de dévoiler leur âge). Les cent deux sujets ont toutefois fait l’objet du suivi longitudinal 1999-2006.

6 Il s’agit des noms de répondants, de leurs adresses ainsi que leur numéro de téléphone en 1999.

7 Cela a permis d’obtenir des renseignements sur les ménages ayant quitté leur bungalow, ainsi que ceux étant décédés depuis la première entrevue.

8 Cette dénomination des groupes d’âge sera utilisée pour le reste de l’article.

9 L’âge est manquant en 1999 et en 2006 pour deux répondants.

10 L’outil compte sept questions simples de type oui / non et pouvant être posées au téléphone ou en questionnaire auto-administré. Le seuil de trois "oui" est jugé comme significatif. Environ le tiers des répondants identifiés par PIRSMA-7 nécessitent du support selon l’outil standardisé d’évaluation de l’autonomie (SMAF) utilisé par le système de santé québécois.

11 Il s’agit des lieux suivants : épicerie, pharmacie, quincaillerie, clinique médicale, station-service, banque, guichet automatique, centre d’achat et église. Ils ont été retenus parce qu’ils sont facilement localisables et représentent une grande part des déplacements des aînés, tout en générant des déplacements réguliers et choisis en termes de fréquence et de localisation.

12 Ce module a par ailleurs été utilisé pour d’autres recherches s’intéressant aux espaces d’action individuels, dont Noël (2003).

13 Pour une présentation exhaustive des quartiers des répondants, consulter Vachon et Luka (2002).

14 En 2006, les jeunes retraités sont maintenant âgés de 61-70 ans, les seniors de 71-80 ans et les anciens de 81 à 89 ans.

15 Le retour téléphonique a permis d’obtenir de l’information sur le lieu de résidence des répondants qui n’ont pas répondu au questionnaire postal.

16 Les répondants avec au moins une des situations suivantes : limitations d’autonomie du répondant, limitations d’autonomie du conjoint, absence de permis de conduire et un âge supérieur à 80 ans.

17 Notons que cette observation ne peut s’appliquer aux répondants n’ayant pu être à nouveau contactés en 2006 ou ayant refusé de répondre au questionnaire postal.

18 Ne disposant pas d’un échantillon paramétré, l’analyse en composantes principales (ACP) est exploratoire. Elle structure l’information fournie par l’analyse centrographique sur les pratiques de mobilité. Comme cette typologie a été croisée avec les caractéristiques des répondants, ces caractéristiques n’ont pas été inclues dans l’ACP.

19 N’ont été retenues que les composantes ayant une valeur propre supérieure à 1,0.

20 Certains arrondissements de la ville de Québec, comme ceux de Beauport et de Charlesbourg, sont particulièrement concernés.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Sébastien Lord, Florent Joerin et Marius Thériault, « Évolution des pratiques de mobilité dans la vieillesse : un suivi longitudinal auprès d’un groupe de banlieusards âgés », Cybergeo: European Journal of Geography [En ligne], Systèmes, Modélisation, Géostatistiques, document 444, mis en ligne le 23 mars 2009, consulté le 28 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/cybergeo/22090 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cybergeo.22090

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Auteurs

Sébastien Lord

Chargé de recherche
Sebastien.Lord@ceps.lu
Centre d'études de populations, de pauvreté et de politiques socio-économiques (CEPS) / International Network for Studies in Technology, Environment, Alternatives, Development (INSTEAD) ; B.P. 48, L-4501 Differdange, Luxembourg ; www.ceps.lu

Florent Joerin

Professeur-chercheur
Florent.Joerin@esad.ulaval.ca
École supérieure d’aménagement du territoire et de développement régional ; Chaire de recherche du Canada en aide à la décision territoriale ; Centre de recherche en aménagement et développement (CRAD) ; Groupe interdisciplinaire de recherche sur les banlieues (GIRBa), Faculté d'aménagement, d'architecture et des arts visuels ; Université Laval, Québec, G1K 7P4, Canada

Articles du même auteur

Marius Thériault

Professeur-chercheur
Marisu.Thériault@crad.ulaval.ca
École supérieure d’aménagement du territoire et de développement régional ; Centre de recherche en aménagement et développement (CRAD), Faculté d'aménagement, d'architecture et des arts visuels ; Université Laval, Québec, G1K 7P4, Canada

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