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2009
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La "Stadtschrumpfung" ou "rétrécissement urbain" en Allemagne : un champ de recherche émergent

Shrinking Cities in Germany: an emerging research field and a new paradigm for analyzing the evolution of cities?
Daniel Florentin, Sylvie Fol et Hélène Roth

Résumés

Depuis une décennie, la notion de "Stadtschrumpfung", ou "rétrécissement urbain", fait l’objet de très nombreux travaux dans la recherche urbaine en Allemagne. Elle désigne un ensemble de dynamiques démographiques, économiques et sociales régressives qui se déploient dans des espaces urbains, principalement dans les nouveaux Länder allemands. Cet article propose une revue de la littérature allemande sur cette notion, à travers plusieurs thématiques : les conditions d’émergence du débat, l’analyse par les scientifiques allemands des facteurs et des manifestations du déclin urbain, l’analyse critique des politiques urbaines mises en oeuvre pour faire face à ce processus. On s’interrogera enfin sur les apports du débat allemand dans la remise en cause du paradigme dominant fondé sur la croissance urbaine.

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Texte intégral

Cet article est fondé sur une présentation au séminaire "Que nous disent les villes allemandes ?" organisé à l’ENS-LSH le 18 Juin 2008. Nous remercions Lydia Coudroy de Lille, organisatrice de cette journée, ainsi que l’ensemble des participants pour les riches débats qui ont eu lieu dans ce cadre.

Introduction

1La notion de Schrumpfung – littéralement traduite en français par rétrécissement, contraction, rétraction, ou, dans une acception plus large, par déclin – est très discutée depuis une dizaine d’années dans la recherche urbaine et régionale allemande. Souvent opposée à la notion de croissance, elle désigne un ensemble de dynamiques démographiques, économiques et/ou sociales régressives qui se déploient dans des espaces urbains donnés, les "schrumpfende Städte". En ce sens, le terme de Schrumpfung peut être interprété comme un nouveau label appliqué à un processus connu et analysé de longue date (Boustedt, 1957), qui s’inscrit dans une accentuation des disparités spatiales en Europe et dans l’affirmation de processus de déclin urbain, particulièrement dans plusieurs pays d’Europe centrale et orientale.

  • 1 Nous remercions ici Johann Frick pour ses explications détaillées et très intéressantes des différe (...)
  • 2 Les auteurs du présent article appartiennent au "Shrinking Cities International Research Network", (...)

2Le terme allemand de Schrumpfung évoque en premier lieu la métaphore du rétrécissement, à l’image du linge lavé à une température trop élevée, mais il peut également désigner la diminution d’une quantité dénombrable, et c’est à ce titre qu’il est d’usage courant en démographie. La Schrumpfung, telle qu’elle est analysée dans la littérature urbaine allemande, renvoie ainsi à une double acception, spatiale et démographique, l’accent étant cependant mis davantage sur la seconde dimension du rétrécissement1. Il est vrai que dans de nombreux cas, les villes qui sont supposées "rétrécir" d’une part ne perdent pas de superficie globale et d’autre part appartiennent à des agglomérations urbaines qui, au contraire, s’étendent et s’étalent (Oswalt, 2006 ; European Commission, 2007). Comme nous tenterons de le montrer en nous appuyant sur les travaux allemands, le processus de contraction urbaine qui se manifeste dans les schrumpfende Städte ne se traduit pas par une diminution du périmètre des villes concernées mais par un processus de "perforation urbaine", qui évide des territoires situés à l’intérieur de l’aire urbaine (Lütke-Daldrup, 2000). L’expression schrumpfende Städte fait également écho à la notion de Shrinking Cities2 développée aux Etats-Unis. Bien qu’également fondée sur l’image du rétrécissement, cette notion, telle qu’elle est développée dans la littérature américaine, renvoie généralement à des processus globaux de déclin urbain, liés aux résultats conjoints de la désindustrialisation et de la suburbanisation, qui ont touché plus particulièrement les villes de la Rust Belt (Weaver, 1977 ; Breckenfeld, 1978 ; Rybczynski et Linneman, 1999). Dans le contexte états-unien, le déclin urbain est généralement associé à des processus de paupérisation et d’accentuation de la ségrégation sociale et raciale (Beauregard, 2003 ; Squires & Kubrin, 2005). Bien que les facteurs de décroissance soient en partie différents dans les deux contextes (la dimension ethnique, notamment, étant beaucoup plus prégnante dans les analyses du déclin des villes américaines), certains auteurs ont rapproché les processus à l’oeuvre en Allemagne de l’Est, en Amérique du Nord et même au Japon, en mettant l’accent sur le caractère "global" des "Shrinking Cities" (Oswalt, 2006).

  • 3 La construction du Mur en 1961 a largement été motivée par l’hémorragie démographique de la RDA dan (...)
  • 4 Traduction du "demographischer Wandel".

3En Allemagne orientale, le déclin démographique a commencé bien avant la chute du Mur3 mais il a été accéléré par la Wende et concerne désormais la plupart des villes est-allemandes. L’émergence dans le débat public de la Schrumpfung, analysée comme une tendance lourde et comme un processus de long terme, date du début des années 2000. Elle renvoie à une double prise de conscience, une dizaine d’années après la réunification : d’une part, l’intensité du phénomène, sa durabilité et son ampleur géographique ont révélé les difficultés de la transformation est-allemande et la faillite d’une réunification qui se voulait intégratrice ; d’autre part, le thème de la Schrumpfung rejoint des préoccupations sociales et politiques croissantes quant au "tournant démographique"4 ou "seconde transition démographique" (Van de Kaa, 1987), qui concerne, lui, l’ensemble de l’Allemagne et au delà, à plus ou moins long terme, l’ensemble des pays industrialisés.

  • 5 Le "State of European Cities Report" examine l’évolution de 258 villes de l’Union entre 1996 et 200 (...)
  • 6 Les travaux récents de Turok et Mykhnenko (2007) portent sur 310 villes européennes définies sur la (...)

4La recherche en sciences sociales s’est emparée de la Schrumpfung à partir de la fin des années 1990. La variété d’approches, d’objets et d’échelles d’analyse complique la compréhension d’une notion encore floue (Brandstetter, Lang, & Pfeifer, 2005). Nous proposons ici une lecture synthétique des approches des schrumpfende Städte est-allemandes dans la recherche urbaine en Allemagne. Il s’agit ici d’interroger la spécificité des formes de déclin urbain qui y sont analysées et de dégager des pistes de comparaison et de réflexion applicables à l’ensemble des villes de l’Europe de l’Ouest. En effet, loin d’être un phénomène isolé ou spatialement circonscrit, le déclin urbain ne touche plus aujourd’hui seulement les villes d’Europe centrale et orientale mais tend à se diffuser dans un grand nombre de régions européennes. Ainsi, selon un rapport de la Commission Européenne, entre 1996 et 2001, un tiers des villes de l’Union Européenne a perdu des habitants5 (European Commission, 2007). Selon Turok et Mykhnenko, (2007), à la fin des années 1990, l'Europe comportait plus d’agglomérations urbaines en déclin que d’agglomérations en croissance démographique6. Le déclin est particulièrement prégnant dans les pays d’Europe de l’Est, en particulier en Roumanie, Bulgarie, dans les Etats Baltes et, de manière plus hétérogène selon les villes, en Hongrie, Pologne et République Tchèque (European Commission, 2007). Parmi les villes en déclin recensées par Turok et Mykhnenko (2007), l’écrasante majorité est située en Russie, Ukraine, Pologne, Roumanie et Allemagne de l’Est. En Europe de l’Ouest, les situations sont plus contrastées avec des différences interrégionales marquées, notamment en Grande Bretagne, en Allemagne et même en France. L’Europe du Sud est aussi caractérisée par de fortes disparités, par exemple entre des villes espagnoles et portugaises à la croissance vive et des villes italiennes stagnantes ou déclinantes (European Commission, 2007 ; Turok & Mykhnenko, 2007). Dans ce contexte, la richesse et la diversité des recherches allemandes apportent des éléments d’analyse originaux pour envisager le futur des villes européennes. Elles ont également le mérite de questionner les politiques urbaines contemporaines, fondées sur un paradigme de croissance pourtant de plus en plus ébranlé. En ce sens, elles ouvrent la voie à une réflexion sur de nouveaux outils d’aménagement, privilégiant un développement urbain plus durable.

5Cet article analyse la littérature allemande sur la Schrumpfung selon quatre thématiques. Dans un premier temps, sont rappelées les conditions d’émergence d’un champ de recherche sur les schrumpfende Städte en Allemagne, ainsi que le rôle des participants, universitaires et non universitaires, à ce débat de plus en plus riche. Dans une seconde partie, nous mettons en avant les facteurs de déclin tels qu’ils sont évoqués par les travaux allemands. Une troisième partie s’appuie sur les analyses des manifestations de la Schrumpfung aux différentes échelles spatiales. Enfin, le dernier thème est consacré aux travaux concernant les politiques urbaines mises en place pour faire face à la Schrumpfung. La conclusion porte sur les apports du débat allemand, notamment en ce qui concerne la remise en cause du paradigme dominant fondé sur la croissance urbaine.

Emergence d’un champ de recherche sur les "schrumpfende Städte" en Allemagne

  • 7 Dès 1972, avec les premières projections démographiques officielles annonçant un futur recul de la (...)

6En Allemagne, si le terme de "schrumpfende Städte" fut évoqué dès les années 1970 dans des documents officiels7, il est véritablement entré dans le champ académique grâce à Häußermann et Siebel, dans un article publié en 1988 dans le Kölner Zeitschrift für Soziologie und Sozialpsychologie consacré aux effets de la désindustrialisation en Allemagne de l’Ouest, en particulier dans la région de la Ruhr. L’article de Häußermann et Siebel a permis une triple avancée : il s’agit de la première grande contribution universitaire sur le sujet ; l’approche de la Schrumpfung n’y est pas purement démographique mais s’attache à en montrer les causes industrielles ou, plus généralement, économiques ; enfin, leur approche envisage la Schrumpfung de manière "positive", ce qui implique aussi la reconnaissance de la Schrumpfung comme processus de long terme et non comme un simple problème d’adaptation temporaire. Les mêmes auteurs avaient cependant déjà utilisé le terme dans un article de la Zeit de 1985 intitulé "Die Chancen des Schrumpfens" dans lequel ils montraient la coexistence en Allemagne de processus de croissance urbaine et de déclin.

  • 8 De fait, avec la chute de l’ex-RDA et les départs massifs de jeunes ménages vers l’Ouest, ces ville (...)
  • 9 Notamment les travaux critiques de Wolgang Kil (2004), architecte-journaliste berlinois qui joue un (...)

7En présentant la Schrumpfung comme une tendance de long terme et comme un état de fait dont il fallait tirer le meilleur parti (une "chance"), ces auteurs mettaient en avant l’idée que le déclin de la population relevait moins d’un changement de degré que d’un changement de nature, qui exigeait donc de considérer davantage la Schrumpfung comme un processus structurel de déclin urbain que comme une simple baisse passagère de la population. Ils furent malgré tout peu écoutés, la plupart des responsables publics et des chercheurs étant convaincus du caractère éphémère et temporaire de cette baisse8. Il fallut attendre de nombreuses années pour que réapparaisse cette idée de faire du déclin une "chance" et de le considérer comme un état de fait à partir duquel il soit possible créer de nouveaux espaces et de nouveaux usages de l’espace urbain. On verra plus loin que cette idée d’appréhender le déclin urbain comme une opportunité est récurrente dans le débat scientifique allemand : elle imprègne aussi bien les travaux du très médiatique groupe "Shrinking Cities", animé par l’architecte Philipp Oswalt, que de nombreux travaux universitaires ou journalistiques9 convergeant dans leur proposition de tirer parti des processus de déclin pour construire "un nouveau paradigme pour les politiques urbaines" (Wiechmann & Siedentop, 2006).

  • 10 Les travaux de la commission, encadrés par l’ancien maire de Leipzig, Heinrich Lehmann-Grube, ont m (...)
  • 11 Entretien avec B. Glock mené par D. Florentin (2008).

8Après la chute du mur, face aux pertes brutales et énormes de population subies par les villes de l’ex-Allemagne de l’Est, des analyses se développent sur les effets des changements de structure économique et de la transition post-socialiste sur la transformation des espaces urbains (Häußermann, 1996, 1997). Le centre de gravité du débat sur le rétrécissement urbain se déplace alors de l’Allemagne de l’Ouest (et des villes industrielles de la Ruhr) vers l’Allemagne orientale. Néanmoins, il faut attendre 2000 et les travaux de la commission Lehmann-Grube (2000)10 pour qu’un champ de recherche sur les "schrumpfende Städte" émerge véritablement et se développe en Allemagne, et en particulier dans les nouveaux Länder11. L’orientation délibérée des travaux de la commission Lehmann-Grube sur les seuls nouveaux Länder dit à elle seule l’importance de cette transformation post-socialiste.

9Les recherches se structurent alors autour de différents pôles institutionnels :

    • 12 Entretien avec M. Bernt mené par D. Florentin (2008).
    • 13 Sur les 17 membres de la commission, on ne dénombre que 2 universitaires, 2 "politiques", et 13 act (...)
    • 14 Notamment à travers des revues scientifiques comme Information zur Raumentwicklung, ou dans le cadr (...)
    • 15 Cf. notamment les travaux sur le Monitoringbericht (Stadtplanungsamt Leipzigs, 2006).

    Le débat sur la Schrumpfung vient de la pratique, et donc des acteurs opérationnels12, qui les premiers ont mis en lumière les situations de déclin pour interpeller les différents pouvoirs publics et la communauté scientifique. Il n’est à cet égard pas étonnant que la plupart des membres de la commission Lehmann-Grube soient issus du monde opérationnel13. Cela explique d’ailleurs que le débat ait été vivement stimulé par la mise en place en 2002 du programme fédéral Stadtumbau Ost, à la suite des travaux de la commission, et qui a créé différents dispositifs de revitalisation des villes en déclin, dont le principal est l’aide à la démolition. Les services du BBR14 (Bundesamt für Bauwesen und Raumordnung) au niveau national, des Länder, de même que les services municipaux des grandes villes de l’ex-Allemagne de l’Est (notamment Leipzig15 et Dresde), sont les producteurs d’une abondante littérature grise constituée de diagnostics et d’études opérationnelles utilisant largement l’outil cartographique et statistique. Les acteurs opérationnels eux-mêmes interviennent directement dans le champ scientifique au travers de publications qui trouvent un écho auprès du monde universitaire, témoignant d’une grande "porosité" entre le milieu opérationnel et celui de la recherche académique. (Florentin, 2008)

    • 16 La fondation Schader a financé le colloque international organisé à Dresde en Mars 2006 "Coping wit (...)
    • 17 Voir notamment le site Internet www.schrumpfende-stadt.de

    Le débat sur la Schrumpfung a été particulièrement popularisé par les fondations, qui jouent un rôle dans le financement et l’animation scientifique des débats sur le sujet. Ainsi, le groupe "Shrinking Cities" a été fondé autour d’un projet financé par le Kulturstiftung des Bundes et a permis une large vulgarisation scientifique de la thématique. Animé par le cabinet d’architecture de Philip Oswalt, ce projet, quoique parfois critiqué pour son faible apport scientifique, s’est attaché à analyser quatre agglomérations urbaines touchées de manière importante par le déclin urbain : Détroit, Halle / Leipzig, Ivanovo (Russie) et Manchester / Liverpool. En collaboration avec des chercheurs et professionnels de chaque pays concerné, le groupe a mené des recherches et organisé une exposition itinérante, qui a connu un succès populaire aussi inattendu qu’important. L’objectif poursuivi est non seulement de comprendre les facteurs et les effets du déclin mais également de développer des politiques urbaines innovantes pour ces villes et de leur donner une certaine publicité. Il s’agit de sortir de l’image négative stéréotypée du déclin pour mettre en avant leur potentiel, notamment à travers des stratégies basées sur la culture. L’implication d’artistes dans le projet en constitue donc une dimension essentielle. La puissante Bertelsmann Stiftung est également une pourvoyeuse de financements de recherches centrées sur l’aide à la décision dans une perspective que ses critiques ont souvent qualifiée de néo-libérale. On peut également citer le rôle de la Rosa Luxemburg Stiftung, et surtout de la Schader Stiftung, qui ont financé quelques travaux universitaires sur la question des villes en déclin16, dans une optique davantage centrée sur les effets sociaux des recompositions en cours (Florentin, 2008). La Schader Stiftung a en particulier contribué à la mise en place de plates-formes de discussion pour permettre le lien entre chercheurs et monde opérationnel17.

    • 18 Ainsi Birgit Glock a publié plusieurs articles marquants sur les villes en déclin et coordonné un n (...)
    • 19 Appelés, dans le jargon, les 4R, pour Raumwissenschaftliches Netzwerk.

    La recherche universitaire sur les villes en déclin s’effectue au sein de quelques instituts de recherche et établissements universitaires. La Humboldt Universität accueille des chercheurs impliqués dans ce domaine18 et participe avec quelques établissements berlinois à un programme de financement de doctorants travaillant sur cette question. De même, le Helmhotz-Zentrum für Umweltforschung de Leipzig, ainsi que quatre importants Instituts de recherche de la Leibniz-Gemeinschaft19, dont trois sont basés en ex-Allemagne de l’Est, contribuent à l’essentiel de la production allemande dans ce domaine : l’IfL (Institut für Landerkunde, basé à Leipzig), l’IÖR (Institut für eine Ökologische Raumentwicklung, Dresden), l’IRS (Leibniz-Institut für Regionalenwitcklung, basé à Erkner en Brandebourg) et enfin l’ARL, située à Hanovre. (Florentin, 2008)

  • De façon moins académique, mais tout aussi importante en termes de popularisation des débats, on peut noter l’importance de la presse dans le débat, que ce soit à travers les articles de Wolgang Kil, ou, à une plus grande échelle, à travers les nombreux cahiers que Die Zeit a pu consacrer ces dernières années au "tournant démographique" et à ses conséquences. (Die Zeit, 2005)

10Dans la période la plus récente, ces travaux universitaires ont connu une diffusion internationale importante, qui permet de dresser un premier bilan des différentes approches de la "Schrumpfung".

Les facteurs du déclin

  • 20 La plupart des analyses sont réalisées à l’échelle des communes urbaines, assez vastes depuis les r (...)
  • 21 "La ville transformée : déséconomisation, dépopulation, désurbanisation"

11Le déclin urbain en Allemagne orientale, tel qu’il est analysé dans la littérature allemande depuis une dizaine d’années, se caractérise à la fois par une chute de la population de nombreuses agglomérations urbaines20 et par des difficultés économiques accompagnées de problèmes sociaux (chômage, paupérisation et accroissement de la ségrégation). Il est envisagé par certains auteurs comme le résultat d’une rupture systémique enclenchée lors de la Wende, posant la question de la spécificité post-socialiste des trajectoires urbaines est-allemandes (Wissen, Nauman, 2006). En Allemagne de l’Est, les effets conjugués de la recomposition post-socialiste, de la désindustrialisation, de la périurbanisation, et du facteur démographique ont produit un modèle de déclin inconnu jusque là (Oswalt, 2006). Hannemann (2003) évoque le processus en termes particulièrement forts : "die transformierte Stadt : Deökonomisierung, Depopulation, Deurbanisierung"21, laissant des espaces marqués non pas par une économie post-industrielle comme les villes en déclin ouest-allemandes, mais par une "déséconomisation" des espaces. Ainsi, aux hypothèses d’une transition se traduisant par un simple ajustement aux processus de modernisation post-fordiste se sont rapidement substituées des analyses mettant l’accent sur "la simultanéité, l’interdépendance et le recouvrement" entre différentes transformations, qui donnent un caractère "unique" à l’évolution des villes de l’ex-Allemagne de l’Est mais aussi d’une grande partie de l’Europe centrale et orientale (Steinführer et Haase, 2007 ; Boren et Gentile, 2007).

Le facteur démographique et sa composante "naturelle"

  • 22 Entretien avec M. Bernt mené par D. Florentin (2008) ; Turok et Mykhnenko, 2007.

12Le fait démographique, et en particulier les études sur les évolutions de sa partie "naturelle" (par opposition à migratoire) semblent avoir pris une place majeure dans les recherches menées sur la Schrumpfung, en particulier depuis le début des années 2000. Cette prépondérance s’explique probablement en partie par un accès plus aisé aux données, alors que les données d’ordre économique et social sont plus difficiles à analyser voire à obtenir22. Mais cette importance accordée à la démographie, et particulièrement à sa composante naturelle, s’explique aussi par la situation très particulière de l’Allemagne de l’Est à l’échelle européenne, marquée à la fois par les taux de fécondité les plus bas d’Europe et un vieillissement conséquent prononcé (BBR, décembre 2007 ; Buzar et al., 2007).

  • 23 L’ensemble de ces travaux s’inscrit dans un projet de coopération européenne entre des universités (...)

13C’est cette situation spécifique à l’Allemagne de l’Est qui a pu en partie justifier l’émergence de travaux s’appuyant sur le concept assez controversé de "seconde transition démographique". Selon cette hypothèse, les sociétés industrialisées connaîtraient actuellement des changements démographiques décisifs et comparables, dans leurs effets, à ceux issus de la première transition démographique intervenue au dix-neuvième siècle. La baisse de la fécondité, conjuguée à l’augmentation de l’espérance de vie, conduirait à une transformation radicale de la structure des ménages et de la population (Van de Kaa, 1987). Le vieillissement de la population, l’augmentation du nombre de ménages, la diminution de leur taille, de même que l’instabilité grandissante de ces ménages, auraient alors des répercussions sur le plan spatial. Partant de cette hypothèse, différents travaux allemands, surtout impulsés par un groupe de chercheurs de l’UFZ (Helmholtz-Zentrum für Umweltforschung), autour de Sigrun Kabisch et de Philipp Ogden, ont tenté de mesurer les effets de ces changements démographiques sur l’évolution des villes, en particulier en Allemagne de l’Est et dans certains pays d’Europe de l’Est23 (Buzar et al., 2005 ; Couch et al., 2005 ; Buzar et al., 2007 ; Steinführer et Haase, 2007). Ils font apparaître deux types de tendances a priori assez contradictoires.

14En premier lieu, la baisse brutale de la fécondité dans ces pays décrite parfois comme un "choc démographique" (Steinführer et Haase, 2007), a entraîné un déclin rapide des villes, lié à une diminution très prononcée des soldes naturels. Cependant, les facteurs de la baisse de la fécondité font débat : certains auteurs l’attribuent essentiellement à la seconde transition démographique tandis que d’autres y voient plutôt les symptômes de la crise post-socialiste et de la déstabilisation profonde qu’elle a provoquée. L’augmentation du chômage résultant de cette érosion économique et les transformations du système de protection sociale ont en effet conduit à un "sentiment d’insécurité" auquel certains auteurs attribuent la baisse des taux de fécondité, qui a atteint 60 % entre 1989 et 1994 (Glock et Häußermann, 2004).

  • 24 La part des ménages d’une seule personne est passée de 25 % des ménages en 1989 à 34 % des ménages (...)
  • 25 Selon ce modèle, le développement urbain des agglomérations urbaines suivrait trois stades successi (...)

15Une seconde tendance mise en avant par les études des effets de la seconde transition démographique va dans un sens opposé au déclin urbain. En effet, l’augmentation de la part des petits ménages et des ménages d’une seule personne24, la fécondité plus tardive allant de pair avec l’augmentation du taux d’activité féminine, l’augmentation du nombre de couples bi-actifs et plus longtemps sans enfants, auraient un impact sur la "réurbanisation" des villes, qui se repeupleraient grâce à des jeunes ménages attirés par les équipements culturels et l’activité de la ville-centre (Buzar et al., 2007 ; Steinführer et Haase, 2007). La notion de "réurbanisation" a été utilisée dès 1982 par Van den Berg et al. dans leur tentative de dégager un modèle d’évolution des villes25. Plus récemment, une nouvelle vague de travaux reprennent cette notion pour décrire le renouveau démographique de certaines villes-centres, en France (Ogden et Hall, 2000) et en Europe (Buzar et al., 2007), en l’expliquant principalement par les effets de la "seconde transition démographique" (Ogden et Hall, 2000 ; Buzar et al., 2005 ; Buzar et al., 2007). Mettant en avant le rôle explicatif des dynamiques démographiques sur les évolutions urbaines, ces travaux décrivent des processus très proches de la régénération urbaine et de la gentrification, mais en sous-estimant probablement les dynamiques économiques et sociales, qui sont au contraire très présentes dans les analyses habituellement consacrées à ces dernières.

16Quel que soit le type d’impact attribué aux évolutions démographiques, il est frappant de constater l’importance de ce facteur dans le débat allemand sur les villes en déclin (Kabisch et al., 2006). Certains auteurs en font un élément central de l’évolution des villes contemporaines, en mettant en avant, dans le cas des évolutions post-socialistes en Allemagne de l’Est, le "recouvrement des processus démographiques et urbains" (Steinführer et Haase, 2007). L’importance accordée à l’évolution démographique naturelle est cependant discutable car le facteur migratoire, que l’on peut difficilement disjoindre de considérations sur le marché du travail, joue un rôle bien plus déterminant dans l’analyse spatiale du déclin démographique que le simple vieillissement (Herfert, 2002). De plus, le poids du seul facteur naturel dans le déclin des villes est difficile à isoler, les travaux mettant également en avant le rôle conjoint des migrations et des processus de périurbanisation (Nuissl et Rink, 2005 ; Kabisch et al., 2006 ; Steinführer et Haase, 2007).

17Si, dans la foulée des travaux sur le tournant démographique et en particulier les études de projection de population, certains chercheurs orientent leur recherche sur la simple perte de population, en occultant une bonne part des aspects économiques de la Schrumpfung, d’autres, tout en montrant le caractère central de la démographie, proposent une lecture plus nuancée, illustrant l’idée que les conséquences de l'évolution démographique ne sont que pour une petite part démographiques (Kaufmann, 2005).

Effets conjugués des transformations post-socialistes et post-fordistes : l’érosion économique, le manque d’emplois et les migrations

  • 26 Une ville comme Leipzig a vu le nombre de ses emplois industriels passer de 100 000 à 20 000 entre (...)

18En Allemagne orientale, la combinaison de processus de transformation post-socialistes et post-fordistes a conduit à un déclin urbain accentué (Prigge, 2006 ; Wiechmann, 2007). Au début des années 1990, les transformations économiques liées à la chute du régime socialiste et au processus de réunification se sont effectuées de manière extrêmement rapide. La privatisation des entreprises s’est accompagnée d’une modernisation à marche forcée, se traduisant par une diminution drastique du secteur industriel, du secteur agroalimentaire et même tertiaire, et des emplois qui leur étaient liés, au point qu’on a pu parler de "déséconomisation" (Hannemann, 2003). Les transformations post-fordistes, qui se sont effectuées de manière assez graduelle dans les villes de l’Ouest, se sont exercées dans les villes de l’Est comme une "thérapie de choc" (Bontje, 2004). L’Allemagne de l’Est, devenue pour certains auteurs une région industrielle périphérique dépendante de l’Allemagne de l’Ouest (Prigge, 2006) a aujourd’hui la plus faible part d’emplois industriels de l’Europe tandis que le taux de chômage y est deux fois plus élevé qu’en Allemagne de l’Ouest (Glock et Häußermann, 2004). Entre 1989 et 1995, entre 70 et 90 % des emplois industriels ont disparu en Allemagne de l’Est26 et la population active ayant un emploi est passée d’environ 8,6 millions en 1989 à environ 6,1 millions en 2001 (Nuissl et Rink, 2005). Trop périphériques et trop marquées par "l’hypothèque" de la ville socialiste (Hannemann, 2003) par rapport aux grands centres de décision européens pour être attractives aux yeux des investisseurs, les villes de l’Est ont alors été l’objet d’une émigration massive, notamment de la part des salariés jeunes et qualifiés (en particulier les femmes) partant chercher un emploi dans les villes de l’Ouest. Entre 1991 et 1999, environ 1,7 millions d’habitants d’Allemagne de l’Est ont émigré (Glock et Häußermann, 2004). Faute d’emplois, même les villes les mieux dotées du point de vue des équipements culturels et intellectuels, comme Berlin, Dresde et Leipzig, ont eu du mal à retenir leurs jeunes cadres et à attirer de manière massive les nouveaux investissements (Schmidt, 2006). Les villes les plus dynamiques peinent elles-mêmes à concentrer suffisamment de main d’œuvre qualifiée pour atteindre la masse critique permettant de garder les compétences et de favoriser l’innovation locale (Matthiesen, 2006).

Les effets de la périurbanisation sur le déclin des villes

  • 27 Pour le cas particulier de Leipzig, qui correspond exactement à ces données, voir Lütke-Dalrup (200 (...)
  • 28 Franz (2000) lie l’état d’abandon dans lequel les centres-villes ont été laissés par les régimes so (...)

19La transition post-socialiste a eu des effets immédiats sur la structure spatiale des villes d’Allemagne de l’Est, en permettant à une demande latente et grandissante pour des logements individuels périphériques de s’exprimer et de se concrétiser grâce à la mise en place d’aides financières. Une étude citée par Glock et Häußermann (2004) montre que dans 15 villes est-allemandes, la périurbanisation est responsable d’au moins la moitié des pertes de population de la ville centre27. Alors que les régimes socialistes avaient préservé de manière autoritaire la ville dense, produisant une forme de ville "gelée" dans sa forme d’avant-guerre (Franz, 2000), les changements politiques ont brutalement ouvert la voie à l’étalement urbain. Et, tandis que les centres-villes négligés pendant des décennies étaient parvenus à un état de dégradation peu compatible avec des possibilités de valorisation immobilière à court terme (Häußermann, 1996 ; Franz, 2000 ; Nuissl et Rink, 2005)28, la périphérie offrait des espaces beaucoup plus rentables pour l’investissement immobilier.

  • 29 Il faut ici préciser que les exonérations fiscales pour l’accession à la propriété concernaient seu (...)

20Dès lors, dans les années 90, le processus de périurbanisation s’est nourri à la fois des blocages créés par la transition post-socialiste et des débuts balbutiants de la planification urbaine locale. Comme l’indiquent Nuissl et Rink (2005), les lenteurs des procédures de restitution des biens immobiliers ont empêché tout investissement dans les centres-villes pendant plusieurs années, tandis que les autorités locales ont été pour l’essentiel impuissantes à freiner les investissements en périphérie. De fait, ces investissements étaient plutôt considérés comme bénéfiques, la conception dominante des acteurs locaux étant que "l’étalement urbain n’est pas seulement inévitable mais aussi un signe désirable de progrès" (Nuissl et Rink, 2005). Par ailleurs, les aides fédérales destinées à favoriser l’investissement immobilier ont été allouées sans appliquer de critères de localisation, ce qui a naturellement favorisé les développements suburbains29, beaucoup moins contraignants à mettre en œuvre. Enfin, l’accroissement des revenus d’une partie des ménages a permis à ceux-ci de réaliser leurs aspirations à s’installer en périphérie, dont certains auteurs soulignent qu’elles ont été largement encouragées par les pouvoirs publics, la publicité et les medias (Nuissl et Rink, 2004 et 2005). De même, dans le domaine du commerce et de l’immobilier d’entreprises, c’est en banlieue que les investissements se sont localisés massivement, attirés par une offre foncière abondante et des règles d’urbanisme peu contraignantes (Franz, 2000 ; Couch et al., 2005).

21Néanmoins, la périurbanisation, considérée comme un rattrapage par rapport aux évolutions ouest-allemandes, a pu masquer le caractère plus structurel des dynamiques urbaines régressives. Car si le desserrement urbain était un des facteurs explicatifs du déclin urbain dans les années 1990, il s’essouffle fortement dans les années 2000 (BBR, 2006), à l’exception de la couronne berlinoise. La fin de la périurbanisation est liée à la disparition de divers avantages (aides à la construction), à la désaffection du modèle résidentiel pavillonnaire et à la revalorisation de l’attractivité de l’habitat en ville, ainsi qu’au tarissement de sa source, les jeunes ménages (Herfert, 2007). Le déclin urbain est-allemand se "diffuse" ainsi aux espaces périurbains, du fait de l’interruption des flux migratoires centrifuges (Herfert, 2002, 2007). L’arrêt du desserrement urbain et la généralisation des processus de déclin à l’échelle régionale à partir du début des années 2000 a mis en évidence l’acuité et la singularité de ces processus par rapport à ceux ayant cours dans un certain nombre de villes d’Allemagne et d’Europe de l’Ouest, où les phénomènes de décroissance et ceux de déconcentration urbaines sont fortement liés. En Allemagne orientale, la périurbanisation n’a constitué qu’un frein de courte durée dans une dynamique régressive de plus grande portée.

22La transition post-socialiste a donc déstabilisé la structure économique, démographique et spatiale des villes, conduisant à de nouvelles formes de déclin urbain et de ségrégation résidentielle (Buzar et al., 2007). La combinaison de la restructuration économique, de processus de périurbanisation très rapide, des départs massifs vers l’Ouest et d’un contexte de déclin démographique est à l’origine de trajectoires spatiales que certains auteurs considèrent comme propres à ce pays (Nuissl et Rink, 2005).

La différenciation spatiale des processus de déclin

23Dans les analyses menées aujourd’hui en Allemagne, le déclin est envisagé comme le pendant de la croissance (Heineberg, 2004), non comme une "déviation par rapport au cas normal (croissance urbaine et régionale) mais comme une dynamique spatiale à part entière" (Wissen, Naumann, 2006). Mais les effets de causalité entre les deux processus sont peu analysés en profondeur à l’échelle nationale. La différenciation spatiale des processus de déclin est envisagée au niveau régional et surtout à l’échelle communale.

Une généralisation du déclin à l’échelle régionale

  • 30 Quand au moins quatre indicateurs sont dans le quintile le plus bas, alors la commune est dite "en (...)

24A l’échelle régionale, les processus de déclin tendent à se généraliser à tous les types d’espaces (urbain, périurbain et rural) et concernent une très grande majorité des villes est-allemandes. D’un point de vue statistique, à partir d’une série de 6 indicateurs (population, solde migratoire, développement des emplois, taux de chômage, puissance fiscale des communes, pouvoir d’achat), 53,5 % des communes d’Allemagne de l’Est seraient "en déclin", contre 2,6 % à l’Ouest30 (Gatzweiler et al., 2003 ; Heineberg, 2004). Mais ces processus sont plus ou moins accentués selon les villes, leur situation géographique, leur structure économique initiale et leur taille. Alors que les plus grandes (Leipzig, Dresde, Erfurt-Weimar-Iena) font figure "d’îlots de stabilité, voire de croissance" très relative (Herfert, 2007), les villes petites et moyennes sont particulièrement touchées. Mais dans l’ensemble, l’analyse du déclin urbain au niveau régional ou en termes de systèmes de villes est peu développée dans la littérature (Killisch, Siedhoff, 2005), l’essentiel portant sur des études de cas. Des exemples de cas "paroxystiques" sont ceux de Hoyerswerda (Hannemann, 2003), Wolfen, Weisswasser (Bernt, Kabisch, & Peter, 2005 ; Kabisch, 2006), ou Johanngeorgenstadt (Bose, Wirth, 2006), dont les variations de population entre 1990 et 2004 oscillent entre –30 et –40 %. Mais les études sur Leipzig et Dresde sont plus nombreuses. Les évolutions socio-démographiques y sont plus différenciées, parfois très légèrement positives (Wiechmann, 2007), ce qui rend les problématiques différentes, le déclin urbain pouvant y être envisagé comme une chance.

A l’échelle locale : réurbanisation ou perforation urbaine ?

  • 31 Herfert (2007) souligne cependant que ce retour au centre concerne très peu de ménages périurbains.
  • 32 Cette réurbanisation par les populations étudiantes ou par les jeunes ménages est sans doute réelle (...)

25Après une phase caractérisée par un processus marqué de périurbanisation, les changements de structure démographique et les politiques de rénovation menées dans les années 1990 (Stadterneureung) ont conduit récemment à un réinvestissement des centres par des jeunes et petits ménages, en provenance des nouveaux Länder et de l’étranger31 (Herfert, 2007). Ce processus, évoqué plus haut et qualifié de "réurbanisation" par certains auteurs (Buzar et al., 2007), ne concerne toutefois que les plus grandes villes. Ainsi, dans certains quartiers centraux de la ville de Leipzig, la part des ménages d’une seule personne dépasse la moitié et près de 45 % d’entre eux ont moins de 40 ans. Par ailleurs, la pratique de la co-location (les fameuses Wohngemeinschaften, WG) par les étudiants se développe dans ces quartiers, favorisée par un parc de logements attractif, bien desservi et à loyer peu élevé, conduisant à un processus de "studentification" identifié à Dresde ou à Leipzig (Buzar et al., 2007, Hill & Wiest, 2003). La croissance démographique qui en découle (que les auteurs qualifient toutefois de "fragile"32) ne touche cependant que certains quartiers, elle ne compense pas les pertes à l’échelle communale et on peut s’interroger sur sa portée réelle à long terme. Ainsi, à Leipzig, alors que la plupart des quartiers centraux ont atteint des taux de croissance démographique annuels de 9 % en 2003, la population de la ville dans son ensemble a augmenté de moins de 1 %. Le "retour au centre" et la "studentification" à Leipzig s’effectuent dans des quartiers différents ; l’hyper centre (Innenstadt) n’est pas occupé par les étudiants, qui lui préfèrent la Südvorstadt, Schleußig ou Connewitz.

26Par ailleurs, les quartiers périphériques de l’ère socialiste ont connu des pertes de population intenses, conduisant à une fragmentation des territoires de la ville (Buzar et al., 2007). En 2005, la ville de Leipzig comptait 45 000 logements vacants, représentant 14 % du parc de logements de la ville. Cette situation, rendant l’investissement immobilier très peu rentable, laisse certains quartiers dans un état de dégradation important, contribuant à un processus de "perforation urbaine" : tandis que certaines parties de la ville, notamment au centre, parviennent à améliorer leur situation, d’autres quartiers connaissent une dégradation continue de leur parc de logements et de leurs infrastructures (Lütke-Daldrup, 2001). Le développement suburbain, allié aux départs vers l’Ouest et au solde naturel très négatif de la ville ont accentué ce phénomène de perforation urbaine (Nuissl et Rink, 2005 ; Couch et al., 2005). Ainsi, les villes d’Allemagne de l’Est connaissent des processus simultanés de croissance et de déclin (Prigge, 2006), voire un processus de polarisation entre réurbanisation et désurbanisation (Rink, 2006).

  • 33 Ce n’était d’ailleurs pas le cas à la fin des années 1990. Pour Leipzig par exemple, en 2000, la va (...)

27De manière générale, si le problème des logements vacants est largement répandu en Allemagne de l’Est, il est particulièrement aigu dans certains secteurs. Glock et Häußermann (2004) montrent que si la plus grande concentration relative de logements vacants se trouve dans les quartiers centraux, qui en comptent près d’un tiers, le véritable problème, en termes absolus, réside dans les grands ensembles des quartiers périphériques qui comptent environ 200 000 logements vacants au total33. La période socialiste avait produit une "structure urbaine duale" (Glock et Häußermann, 2004) au sein de laquelle l’investissement était principalement orienté vers les grands ensembles des quartiers périphériques alors que les quartiers centraux étaient pour l’essentiel laissés à l’abandon (Franz, 2000 ; Couch et al., 2005). Au moment de la chute du mur, 20 % de la population d’Allemagne de l’Est vivait dans les grands ensembles tandis que 420 000 logements étaient vacants, principalement dans les quartiers centraux. Malgré les investissements massifs postérieurs à la réunification, la désaffection pour les quartiers périphériques n’a pu être enrayée (Glock et Häußermann, 2004).

28L’importance de la vacance conduit à une augmentation de la mobilité des ménages mais celle-ci est limitée aux couches moyennes, qui peuvent jouer sur la modicité des loyers pour construire leurs stratégies résidentielles. En revanche, les ménages modestes se retrouvent confinés dans les segments les plus dévalorisés du parc de logements et dans les quartiers les moins attractifs, qui sont également ceux où les infrastructures et les équipements sont les moins bien entretenus. Le départ des catégories les plus aisées, de même que la détérioration des équipements et des services est à l’origine d’un processus cumulatif de paupérisation des quartiers les plus défavorisés (Glock et Häußermann, 2004) qui sont souvent les quartiers périphériques de grands ensembles, d’où leur dégradation récente et accélérée comme le quartier de Grünau à Leipzig.

La Schrumpfung et les politiques urbaines 

29La dévalorisation rapide de certains quartiers et les effets économiques déstabilisateurs de la vacance à grande échelle ont amené les pouvoirs publics à mettre en place des dispositifs spécifiques pour répondre aux enjeux très particuliers se posant dans les villes d’Allemagne de l’Est.

Stadtumbau Ost : des stratégies centrées sur la démolition

  • 34 Les fonds alloués dans le cadre de Stadtumbau Ost fonctionnent sur le principe des "trois tiers" : (...)
  • 35 Cela s’explique notamment par le fait que, dans la pratique, ce sont les compagnies municipales qui (...)

30L’analyse de la Schrumpfung peut être effectuée à travers l’étude des différents programmes fédéraux, comme Soziale Stadt, ou plus récemment et plus fortement Stadtumbau Ost. Le développement de la vacance a eu des effets importants sur les marchés immobiliers des villes est-allemandes. Son effet dépressif sur les loyers et prix immobiliers a découragé en grande partie l’investissement privé tandis que les collectivités locales, propriétaires de plus de 40 % du parc de logements est-allemand, ont eu à faire face à des difficultés financières grandissantes liées en particulier aux dettes de l’époque socialiste (les Altschulden) que la trop grande vacance empêche structurellement d’éponger. Le manque à gagner en termes de loyers a fini par éroder les ressources publiques locales, affectant la capacité financière de nombreuses villes (Glock et Häußermann, 2004). A partir des années 2000, après une période de "déni" des processus de déclin urbain, l’ampleur des problèmes amène les acteurs locaux à se saisir, quand ils le peuvent financièrement,34 des outils opérationnels mis en place par le gouvernement fédéral, en particulier dans le cadre du programme "Stadtumbau Ost". Ce programme est destiné à donner les moyens aux collectivités locales de "développer des approches cohérentes et globales pour résoudre le problème de la vacance des logements", son objectif majeur étant de conserver des centres-villes attractifs et socialement mixtes en Allemagne de l’Est (Glock et Häußermann, 2004). La réhabilitation de certains quartiers, le développement de l’accession à la propriété dans les centres-villes et surtout, la démolition à grande échelle des logements, en sont les outils principaux. La réduction de l’offre de logements apparaît comme l’un des moyens privilégiés de revalorisation du marché immobilier privé, même si cette solution est extrêmement coûteuse pour les finances publiques puisqu’au delà des coûts de démolition eux-mêmes, les collectivités doivent souvent prendre en charge l’aide au relogement des locataires35 et la rénovation des infrastructures et réseaux consécutive à la démolition (Glock et Häußermann, 2004 ; Wissen, Nauman, 2006).

31Deux lectures du programme sont proposées dans la littérature : une lecture critique et une lecture plus technique. Si le principe des démolitions est souvent présenté comme ne faisant que peu débat, la mise en pratique du programme est pourtant sujette à critique, suscitant à la fois des déceptions sur les politiques de revalorisation, et plus généralement sur l’absence de politique intégrée (Häußermann, 2005). Les débats soulignent également le jeu d’acteurs inégal dans la mise en œuvre des politiques locales et les limites d’une politique centrée sur la démolition des grands ensembles de l’ère socialiste (Glock et Häußermann, 2004 ; Kabisch et al., 2005 ; Oswalt, 2006 ; Bernt, 2003 et 2006 ; Bernt & Kabisch, 2006). C’est de ces critiques qu’a pu émerger un appel à l’intervention de l’Etat pour assurer et financer les destructions et la trop souvent manquante revalorisation (Bernt, 2005), dans une logique que l’on pourrait qualifier de keynésienne, l’Etat étant vu comme le seul acteur à même de pouvoir dépasser des logiques purement économiques de rentabilité au nom de l’intérêt général.

32La lecture technique favorise quant à elle une approche en termes d’outils de planification, et des apports des différents programmes en la matière. L’outillage technique qu’impose la mise en place de Stadtumbau Ost, et en particulier les systèmes de gestion et d’évaluation sont ainsi passés au crible (Wiechmann & Siedentop, 2005). Cette approche technique ou technicienne sur des problèmes de planification, n’est pas cependant dénuée de critiques à l’égard d’un programme dont les exigences en termes de suivi et de politique de revalorisation sont souvent difficiles à tenir pour des villes petites ou moyennes qui n’ont pas les capacités financières et techniques de Dresde ou Leipzig.

Des stratégies d’image

33Les politiques de démolition s’articulent avec des stratégies de revalorisation de l’image des villes, et en particulier de leurs quartiers centraux. Il s’agit de "revitaliser" ces quartiers par l’installation de commerces et de services et par la mise en valeur d’un patrimoine touristique attractif (Prigge, 2006 ; Kunz, 2007 ; Stadt Leipzig Dezernat Planung und Bau, 2000). Dans la lignée des politiques de régénération menées dans d’autres pays, les acteurs locaux œuvrent activement à la mise en place d’outils de marketing territorial, associée à des politiques de gentrification visant à faire revenir dans les centres-villes les ménages des couches moyennes et aisées qui les avait quittés pour accéder à la propriété en périphérie. Ces politiques de "réurbanisation" des centres prennent pour cible les jeunes ménages et les étudiants, qui peuvent contribuer à la "studentification" de certains quartiers, comme évoqué plus haut dans les cas de Dresde ou de Leipzig (Buzar et al., 2007). Centrées sur la création d’espaces culturels et de consommation pour les "nouveaux entrepreneurs" de l’économie de l’information, ces stratégies de régénération laissent de côté les territoires périphériques de la période socialiste et ont pour effet, selon certains auteurs, d’accentuer les processus de polarisation socio-spatiale (Prigge, 2006).

La crise des finances communales

34Deux autres éléments viennent renforcer les processus de déclin : l’endettement profond des collectivités locales, débouchant sur une véritable crise des finances communales ; la diminution progressive des subventions européennes (élargissement vers des zones plus pauvres oblige) et des compensations Est-Ouest du gouvernement fédéral.

35La crise financière des communes (qui n’est pas une spécificité est-allemande, et qui a été un peu atténuée par la réforme de 2003) est particulièrement aiguë dans les nouveaux Länder, puisque la diminution de la population et l’érosion économique se traduisent par une diminution des recettes (impôts sur le revenu et taxe professionnelle), d’autant plus importantes que les migrations ont été socialement sélectives. De surcroît, le nombre d’habitants est un des principaux critères intervenant dans les dotations fédérales et régionales. Parallèlement, le déclin pose aux communes des problèmes coûteux à résorber (vacance des logements, friches industrielles, réorganisation des infrastructures), et la précarisation de la population augmente les dépenses d’aides sociales (Killisch, Siedhoff, 2005). Des études s’attachent à analyser les problèmes de planification posés par le déclin urbain en matière d’infrastructures (Muschwitz et al., 2002). Dans un contexte de diminution de la population, celles-ci deviennent surdimensionnées (en particulier les infrastructures en réseau qui avaient été modernisées, au début des années 1990, sur des projections de croissance urbaine) et leur adaptation au nouveau contexte de déclin est extrêmement coûteux et tend à renforcer les disparités socio-spatiales en termes d’accès aux infrastrcutures (Naumann, Wissen, 2006). La crise financière des communes et leur endettement participe donc de la spirale du déclin, en enrayant le dynamisme économique et donc urbain des villes moyennes ou petites, et même des grandes villes comme Berlin, Leipzig ou Dresde. Toutefois, si elle est mentionnée comme élément de déclin, elle est peu analysée en profondeur dans la littérature allemande. La recherche allemande se concentre ainsi sur l’analyse des programmes de rénovation urbaine, de marketing urbain et sur la difficile gestion des infrastructures dans un contexte de déclin. Mais très peu d’études sont consacrées aux actions de développement économique mise en oeuvre par les villes pour enrayer la "déséconomisation" des territoires urbains.

Conclusion : le changement de paradigme, entre incantation et réalité

36Aujourd’hui, les villes d’Allemagne orientale sont soumises aux mêmes transformations structurelles que leurs homologues de l’Ouest, mais sur une durée beaucoup plus réduite, renforçant l’idée d’une "thérapie de choc" (Bontje, 2004) : elles doivent faire face à la désindustrialisation, à des phénomènes de polarisation socio-spatiale et à des processus d’étalement urbain similaires (Steinführer et Haase, 2007). Elles sont cependant marquées par des manifestations du déclin qui ont un caractère accentué et plus avancé que celui des villes de l’Ouest, ce qui en fait pour certains auteurs des "laboratoires" pour l’Ouest vieillissant (Reuther, 2003).

37Par ailleurs, l’ampleur du phénomène invite une partie des auteurs à envisager la Schrumpfung comme une opportunité pour un changement de paradigme par rapport aux visions classiques des politiques urbaines centrées sur la croissance urbaine (Gatzweiler et al., 2003). Le paradigme de la croissance urbaine, jusque là dominant chez les acteurs de l’aménagement et de l’urbanisme, doit à leurs yeux être remplacé "en développant de nouveaux objectifs stratégiques pour les évolutions urbaines, traitant le déclin non seulement comme une menace mais aussi comme une chance pour reconstruire les espaces urbains" (Kabisch et al., 2006). Le déclin offrirait ainsi des chances que n’ont pas les villes en croissance, en termes d’espace pour des initiatives créatives et innovantes et de loyers modérés pour des entreprises nouvelles (Bontje, 2004), ou en termes de possibilités d’expérimentation de nouveaux modes de gouvernance (Naumann, Wissen, 2006). Philipp Oswalt (2006) parle également de "nouveau potentiel". Le déclin serait donc ainsi à la base d’une réflexion sur les conditions de mise en œuvre d’une ville durable dont la croissance ne serait plus le principal objectif. Dans cette optique, les acteurs des politiques urbaines sont encouragés à valoriser d’autres dimensions telles que la moindre densité, l’urbanité, le patrimoine urbain, la soutenabilité des réseaux, les espaces publics...

38Dans la même veine, Nuissl et Rink (2005) en appellent également à la construction d’un nouveau paradigme pour les politiques urbaines. Les outils de planification actuels ayant été forgés pour organiser la croissance et pas le déclin, les acteurs locaux sont aujourd’hui peu armés pour faire face aux nouveaux enjeux, tels que l’étalement urbain ou les processus de perforation urbaine (Bernt, 2005 ; Doehler, 2003). Le modèle de "la ville européenne" dense n’aurait plus véritablement de sens en tant que guide des politiques urbaines, dans un contexte où les espaces urbains sont plutôt en voie de dissolution. Ils concluent à la nécessité de trouver de nouveaux usages pour les ressources spatiales abondantes que renferment les villes en déclin (Nuissl et Rink, 2005).

  • 36 La ville "prairie" et la ville "svelte".

39Si cet appel au "changement de paradigme" est récurrent dans les discours allemands (avec l’invention de "concepts" comme Präriestadt, Schlanke Stadt...36), il est plus difficile de voir sa concrétisation, sauf dans la réalisation systématique d’espaces verts préconisée et timidement mise en œuvre à l’issue des démolitions du programme "Stadtumbau Ost". Par ailleurs, il n’est pas partagé par tous : Häußermann (2005) met en garde contre le retournement radical de paradigme qui s’opère depuis quelques années sur la base de projections au fil de l’eau, considérées un peu vite comme irréversibles. Par ailleurs, l’idée de la "chance" que représenteraient le déclin et la dédensification, en particulier pour les grandes agglomérations, est remise en cause pour les petites villes fortement décroissantes, trop dépourvues de ressources financières, mais surtout humaines, pour relever le défi de la construction d’une ville "durable" (Bose, Wirth, 2006).

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Notes

1 Nous remercions ici Johann Frick pour ses explications détaillées et très intéressantes des différents sens du mot Schrumpfung.

2 Les auteurs du présent article appartiennent au "Shrinking Cities International Research Network", qui fait partie des programmes de recherche du Center for Global Metropolitan Studies de l’Université de Californie à Berkeley. Ce réseau de recherche international s’est constitué à partir du constat selon lequel les "Shrinking Cities" constituent une problématique commune à des pays pourtant très différents et qu’en ce sens, on peut émettre l’hypothèse d’une globalisation des processus de déclin urbain. Douze pays sont actuellement représentés (Australie, États-Unis, Canada, Brésil, Mexique, Japon, Corée du Sud, Allemagne, Pologne, Espagne, Grande Bretagne et France) au sein d’un réseau qui compte une cinquantaine de chercheurs. Les auteurs s’appuient ici largement sur les réflexions et travaux collectifs menés dans ce cadre. Une partie des recherches sur lesquelles est basé cet article ont été conduites avec Emmanuèle Cunningham-Sabot dans la perspective d’un travail de synthèse sur les Shrinking Cities dans la recherche internationale (Fol et Cunningham-Sabot, à paraître).

3 La construction du Mur en 1961 a largement été motivée par l’hémorragie démographique de la RDA dans les années 1950.

4 Traduction du "demographischer Wandel".

5 Le "State of European Cities Report" examine l’évolution de 258 villes de l’Union entre 1996 et 2001. Il analyse les tendances à différentes échelles : villes-centres et agglomérations urbaines. Le rapport montre que dans la période considérée, un tiers des agglomérations urbaines étudiées ont gagné de la population, un tiers ont vu leur nombre d’habitants stagner et le dernier tiers a perdu de la population. Quatre types d’évolution urbaine ont été dégagés : "l’urbanisation" se caractérise par une croissance de l’agglomération dans son ensemble (ville-centre et périphéries) et peut être constaté dans environ un tiers des villes de l’échantillon ; le "déclin urbain généralisé" (overall urban decline) désigne un déclin de l’ensemble de l’agglomération et peut être observé dans un tiers des cas étudiés, en particulier en Allemagne de l’Est et dans tous les pays d’Europe de l’Est (à l’exception de la Bulgarie), mais aussi en Allemagne de l’Ouest (région de la Ruhr) et en Italie ; la "suburbanisation" (là on ne peut pas changer, c’est le terme utilisé par les auteurs)se caractérise par une croissance de la banlieue au détriment de la ville-centre et concerne environ un quart des villes étudiées ; la "re-urbanisation" décrit des exemples où la ville-centre et sa périphérie gagnent l’une et l’autre de la population, mais la première plus vite que la seconde, ce cas relativement rare (5 % des villes de l’échantillon) concernant des villes où en général, le manque d’espace restreint les possibilités de "suburbanisation" (idem). L’approche du déclin urbain développée dans ce rapport se fonde uniquement sur le critère démographique (perte de population), ce qui est à notre sens très restrictif, mais elle a le mérite de donner une vision globale et comparative de l’évolution de la population des agglomérations européennes.

6 Les travaux récents de Turok et Mykhnenko (2007) portent sur 310 villes européennes définies sur la base de critères de continuité du bâti et de seuil de population. Cette définition en termes d’agglomération urbaine inclut les banlieues, les auteurs souhaitant éviter de prendre en compte des cas de déclin urbain s’expliquant uniquement par un mouvement de desserrement de la population du centre vers les banlieues. De même que la vague de travaux qui l’ont précédée (Van den Berg et al., 1982 ; Cheshire et Hay, 1989 ; Cheshire, 1995 ; Ogden et Hall, 2000 ; Buzar et al., 2005), l’analyse de Turok et Mykhnenko repose, comme le rapport de la Commission Européenne, sur des critères d’évolution de la population. Ils le justifient de la manière suivante : "population is used as the main indicator of city trajectories partly for resaons of data availability and consistenci with previous research (...). Population can also be justified as a useful indicator of changing urban conditions, although obviously it does not provide a full picture of urban change". Ainsi, même si les auteurs reconnaissent le caractère réducteur de l’indicateur démographique, ils le retiennent pour des raisons de disponibilité des données.

7 Dès 1972, avec les premières projections démographiques officielles annonçant un futur recul de la population.

8 De fait, avec la chute de l’ex-RDA et les départs massifs de jeunes ménages vers l’Ouest, ces villes de l’Ouest (comme Duisbourg, étudiée par Birgit Glock (2005) ) ont retrouvé la croissance démographique qui leur faisait défaut, mais cela s’est mécaniquement reporté sur les villes d’Allemagne de l’Est, touchées par un déclin d’autant plus marqué.

9 Notamment les travaux critiques de Wolgang Kil (2004), architecte-journaliste berlinois qui joue un rôle majeur dans la popularisation de la thématique des Schrumpfende Städte.

10 Les travaux de la commission, encadrés par l’ancien maire de Leipzig, Heinrich Lehmann-Grube, ont mis au jour l’importance de la vacance dans les villes des nouveaux Länder, où l’on trouvait alors près d’un million de logements vacants.

11 Entretien avec B. Glock mené par D. Florentin (2008).

12 Entretien avec M. Bernt mené par D. Florentin (2008).

13 Sur les 17 membres de la commission, on ne dénombre que 2 universitaires, 2 "politiques", et 13 acteurs opérationnels (planificateurs, responsables de sociétés immobilières, bailleurs, banques,etc...).

14 Notamment à travers des revues scientifiques comme Information zur Raumentwicklung, ou dans le cadre de conférences organisées par le BBR (2007).

15 Cf. notamment les travaux sur le Monitoringbericht (Stadtplanungsamt Leipzigs, 2006).

16 La fondation Schader a financé le colloque international organisé à Dresde en Mars 2006 "Coping with city shrinkage and demographic change : lessons from around the globe". Ce colloque a accueilli les membres du Shrinking Cities International Research Network (SCiRN) dont font partie les auteurs du présent article.

17 Voir notamment le site Internet www.schrumpfende-stadt.de

18 Ainsi Birgit Glock a publié plusieurs articles marquants sur les villes en déclin et coordonné un numéro récent du Berliner Debatte (2006) consacré à cette thématique.

19 Appelés, dans le jargon, les 4R, pour Raumwissenschaftliches Netzwerk.

20 La plupart des analyses sont réalisées à l’échelle des communes urbaines, assez vastes depuis les réformes territoriales et administratives des années 1990 et la fusion entre villes-centres et communes périphériques. Certaines études analysent aussi le déclin à l’échelle des régions urbaines (Franz, 2004).

21 "La ville transformée : déséconomisation, dépopulation, désurbanisation"

22 Entretien avec M. Bernt mené par D. Florentin (2008) ; Turok et Mykhnenko, 2007.

23 L’ensemble de ces travaux s’inscrit dans un projet de coopération européenne entre des universités polonaise (Lodz), tchèque (Brno) et anglaise (Université Queen Mary à Londres).

24 La part des ménages d’une seule personne est passée de 25 % des ménages en 1989 à 34 % des ménages en 2001, tandis que la taille moyenne des ménages diminuait de 2,7 à 2,1 personnes. Le nombre total de ménages a augmenté de plus de 5 % depuis 1990 en Allemagne de l’Est alors que la population a nettement diminué (Nuissl et Rink, 2005).

25 Selon ce modèle, le développement urbain des agglomérations urbaines suivrait trois stades successifs : l’urbanisation, la "suburbanisation", la désurbanisation. Au premier stade, la ville-centre croît plus vite que sa périphérie et les activités s’y concentrent ; au second stade, la "suburbanisation" entraîne une croissance plus rapide de la périphérie et une déconcentration des activités et des résidences, tandis que l’aire métropolitaine poursuit son extension. Au dernier stade, la désurbanisation survient quand les activités et résidences se dispersent au delà des limites de l’aire métropolitaine, conduisant au déclin de l’ensemble de l’agglomération urbaine. Cette théorie de l’évolution urbaine inclut une phase de "réurbanisation" où le coeur de l’agglomération regagne des habitants en valeur absolue ou relative tandis que, pendant cette phase, l’aire métropolitaine dans son ensemble continue de perdre des habitants. Ce modèle, qui considère le déclin urbain comme inéluctable, a été beaucoup discuté. A la suite de Van den Berg et al. qui ont testé leurs hypothèses sur 189 villes de 14 pays européens, de nombreux travaux ont tenté de comparer l’évolution de la population des villes européennes. Dégageant des conclusions beaucoup plus nuancées, plusieurs d’entre eux mettent en évidence des processus de régénération des villes-centres, qu’ils qualifient d’"urban revival" (Cheshire et Hay, 1989) ou de "recentralisation" (Cheshire, 1995). Comme nous l’avons indiqué plus haut, l’approche de ces auteurs est uniquement fondée sur un critère d’évolution de la population.

26 Une ville comme Leipzig a vu le nombre de ses emplois industriels passer de 100 000 à 20 000 entre 1990 et 1993, soit 80 % d’emplois industriels en moins et ce en moins de trois ans (Nuissl & Rink, 2004).

27 Pour le cas particulier de Leipzig, qui correspond exactement à ces données, voir Lütke-Dalrup (2000)

28 Franz (2000) lie l’état d’abandon dans lequel les centres-villes ont été laissés par les régimes socialistes à la doctrine selon laquelle il ne fallait pas "reconstruire la ville bourgeoise". Cette doctrine s’est toutefois relâchée dans quelques villes pendant les dernières années socialistes, parfois sous la pression des habitants. Nuissl et Rink (2005) indiquent qu’en 1989, près de 80 % des logements de Leipzig nécessitaient une réhabilitation, cette situation de dégradation étant à l’origine de manifestations de plus en plus nombreuses de la part des habitants.

29 Il faut ici préciser que les exonérations fiscales pour l’accession à la propriété concernaient seulement les habitants de l’Ouest. Les habitants de l’Est n’y avaient pas le droit, et n’avaient (et n’ont d’ailleurs souvent toujours pas) le capital financier nécessaire pour investir.

30 Quand au moins quatre indicateurs sont dans le quintile le plus bas, alors la commune est dite "en déclin" (schrumpfend), et inversement quand quatre sont dans le quintile le plus haut, la commune est dite "en croissance" (wachsend) (Gatzweiler et al., 2003)

31 Herfert (2007) souligne cependant que ce retour au centre concerne très peu de ménages périurbains.

32 Cette réurbanisation par les populations étudiantes ou par les jeunes ménages est sans doute réelle, mais elle pose aussi des problèmes de données : en effet, la Zweitwohnsitz, habitation secondaire, qui était parfois comptée dans les statistiques de population de la ville, est en train d’évoluer, comme à Leipzig actuellement, où l’on ne compte plus ces habitants temporaires qui sont là moins de six mois dans l’année. Le "retour au centre" souvent annoncé pourrait se trouver nuancé par cette clarification statistique encore en cours.

33 Ce n’était d’ailleurs pas le cas à la fin des années 1990. Pour Leipzig par exemple, en 2000, la vacance était de 39 % dans la Innenstadt (le centre-ville) et de 11 % dans les Großsiedlungen (quartiers d’habitat collectif). (Lütke Daldrup, 2000). L’auteur note que la vacance a cependant tendance à s’aggraver dans ces quartiers de grands ensembles.

34 Les fonds alloués dans le cadre de Stadtumbau Ost fonctionnent sur le principe des "trois tiers" : un tiers financé par la commune, un tiers par le Land, un tiers par le Bund. Mais si la mairie est déjà en situation difficile, elle ne peut plus investir et perd donc les investissements du Land et du Bund. Tout euro non investi entraine donc deux euros de subvention publique en moins, et donc encore moins d’investissements privés connexes.

35 Cela s’explique notamment par le fait que, dans la pratique, ce sont les compagnies municipales qui participent à la destruction d’immeubles, comme la LWB à Leipzig, et qu’elles ont l’obligation contractuelle de reloger dans leur parc. On peut sans doute aussi y ajouter le peu d’intérêt, notamment fiscal, de risquer de voir partir de nouveaux habitants pour une ville en déclin.

36 La ville "prairie" et la ville "svelte".

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Pour citer cet article

Référence électronique

Daniel Florentin, Sylvie Fol et Hélène Roth, « La "Stadtschrumpfung" ou "rétrécissement urbain" en Allemagne : un champ de recherche émergent », Cybergeo: European Journal of Geography [En ligne], Espace, Société, Territoire, document 445, mis en ligne le 26 mars 2009, consulté le 18 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/cybergeo/22123 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cybergeo.22123

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Auteurs

Daniel Florentin

Université Paris 1, Ecole Normale Supérieure-Ulm, Paris, France
Daniel.Florentin@ens.fr

Sylvie Fol

Université Paris 1, UMR 8504 Géographie-cités, Paris, France
sfol@univ-paris1.fr

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Hélène Roth

Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, France
helene.roth@orange.fr

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